Comme à chaque édition de l’Armada de Rouen, l’un des principaux rassemblements de voiliers au monde, la veille de l’événement avait lieu la Grande Pagaille, une parade d’embarcations bizarres – cette année elles étaient 28, dont celle de la CMCAS Haute Normandie – qui doivent arroser les autres et… ne pas couler !
Loufoque et complètement décalée, c’est ainsi que l’on pourrait qualifier la déambulation maritime qui se déroule à Rouen la veille de l’Armada. Elle porte bien son nom : la Grande Pagaille. Le jour J, contents mais un peu stressés, les participants redoutent le vent, qui souffle un peu trop fort. Tous ont prévu des pistolets à eau et même des seaux – plus redoutables et efficaces – pour déstabiliser les adversaires et pourquoi pas les faire chavirer dans la Seine. Associations, écoles, entreprises ou bandes de potes, ils et elles sont 126 à s’affronter dans la joie, devant des spectateurs venus en nombre se masser sur les quais pour assister à cette joyeuse cacophonie.
L’équipe de la CMCAS Haute-Normandie est dans les starting-blocks pour la mise à l’eau. ©Charles Crié/CCAS
Si l’on dénombre quelques passages par-dessus bord amusants pendant la course, notre préféré reste celui de François Bonin, retraité d’EDF, tombé à l’eau sans l’aide de personne au moment de mettre le pied sur son embarcation made in CMCAS Haute Normandie, alors que l’Ofni (comprenez : objet flottant non identifié) était encore amarré. Ce 7 juin, il est accompagné de ses compagnons de Seine, Johan Bloquet, secrétaire général de la CMCAS Haute Normandie, et Thomas Guérin, chargé d’affaires chez GRDF. Avant de naviguer ensemble, les 12 bénévoles se sont retrouvés trois fois courant mai pour fabriquer leur Ofni de toutes pièces.
« Nous sommes partis d’une base de catamaran, y avons ajouté des cannes à pêche, des tissus représentant des algues, des panneaux pour symboliser Rouen et la Normandie, et un autre décoré d’une ampoule pour l’industrie électrique. »
François Bonin, retraité d’EDF, membre de l’équipage de la CMCAS Haute Normandie à la Grande pagaille
Le travail fourni par les bénévoles pendant plusieurs semaines a porté ses fruits : malgré quelques difficultés à naviguer, l’Ofni de la CMCAS a tangué mais n’a pas coulé ! ©Charles Crié/CCAS
Le 13 mai, lors du deuxième samedi de préparatifs, Éric, Johan, Marc, Jocelyne, François, Denis et Monique s’affairaient à diverses activités dans la bonne humeur générale. Tous assuraient que « le plus gros [était] fait ». Romain Pons, électricien à la centrale nucléaire de Paluel (Seine-Maritime), est arrivé en fin de matinée. « J’ai reçu un mail m’indiquant que la CMCAS participait à ce projet, j’ai envie de m’engager davantage dans les Activités Sociales, donc je suis venu donner un coup de main. Cela me plaît beaucoup de proposer des idées, de bricoler et de travailler ensemble sur un projet. »
Jusqu’à la dernière minute, les bénévoles doivent effectuer des réparations. « Ne tirez pas trop ! Attention ! » L’excitation est là et la précipitation finit par causer des petits dégâts. Il faut dire que l’engin de la CMCAS est fait de bric et de broc : l’équipe a choisi un moteur électrique mais aussi beaucoup de matériaux de récupération. Quant au budget, il n’a pas dépassé 500 euros, utilisés essentiellement pour acheter de la peinture. « Nous avons dû prévoir dans la conception que tout doit être facilement démontable le jour J », explique François Bonin.
À l’abordage entre embarcations
Le cahier des charges de la Grande Pagaille précise certaines interdictions, notamment celle d’utiliser des moteurs thermiques, mais il accorde aussi une grande liberté. C’est ainsi que, le 7 juin, s’affrontent sur la Seine des embarcations toutes plus originales les unes que les autres : une à l’effigie de Mario, des pingouins, une vache folle, des Romains, des dragons, etc.
Le tout se déroule dans une ambiance bon enfant, les spectateurs gardent le sourire aux lèvres pendant une heure et se délectent du spectacle qui se joue sous leurs yeux. Des rires, une fanfare, du soleil… Il flotte dans l’air un petit goût de fête !
Vers 18 heures, les embarcations sortent de l’eau et, surprise, aucune n’a coulé ! Certaines sont extirpées par les grues, en mille morceaux. Celle de la CMCAS est, contre tout attente, entière, cependant elle a causé quelques tracas aux navigateurs. « Notre moteur fonctionnait par intermittence mais, avec le vent, on a réussi à s’équilibrer, confie François Bonin. Une navigation sans problème, ça n’existe pas, sinon ce n’est pas drôle. »
Et ce que l’histoire ne raconte pas, c’est que l’un des mâts a arraché une partie de l’embarcation la veille de la course. Une mésaventure qui a demandé à l’équipage d’user d’huile de coude et de solidarité jusqu’au bout. Du bricolage en pagaille, de la couture et du collage de dernière minute pour les volontaires !
Une fois la pression retombée, les navigateurs se disent heureux de l’expérience. « Finalement, bien qu’on se connaisse tous les trois très bien, on a eu du mal à se coordonner », raconte Thomas Guérin. Trois trophées récompensent l’équipe la plus jeune, la plus respectueuse de l’environnement et l’embarcation la plus originale. L’équipe de la CMCAS est repartie bredouille… Les mains vides, certes, mais chacun la tête emplie de souvenirs, couvert de coups de soleil et déjà plein d’espoir de faire mieux en 2027 !
Deux heures de balade joyeuse… et bien arrosée ! ©Charles Crié/CCAS