Bénin : et la lumière fut

Sur la place du village, éclairée depuis fin décembre par un lampadaire installé par Electriciens sans frontières et ABS ONG©KaderSabi/ccas

Sur la place du village, éclairée depuis fin décembre par un lampadaire installé par Électriciens sans frontières et ABS ONG ©KaderSabi/ccas

Installer des panneaux photovoltaïques dans des villages reculés d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine est l’une des principales missions d’Électriciens sans frontières et de ses partenaires locaux. Reportage au Bénin.

De Cotonou, capitale économique du Bénin, il faut une bonne journée de route pour rallier Wansokou, village de quelques centaines d’âmes (ou quelques milliers selon les estimations), situé dans le Nord-Ouest du pays. Entre ornières et nids-de-poule, le véhicule avale péniblement les derniers kilomètres de piste. Au bout du chemin, un panneau annonce enfin la fin du voyage. Des bâtiments en dur coiffés de tôles, avec au centre une grande cour, quelques manguiers et un mât surmonté du drapeau béninois. Nous voici à l’école de Wansokou, l’un des treize villages que l’association Électriciens sans frontières a entrepris d’électrifier, à la demande, et avec l’aide, d’Action Bénin et solidarité (ABS ONG), une ONG locale. « Il s’agit d’améliorer les conditions de vie des gens en installant l’électricité dans les écoles, les dispensaires et les places de ces villages, afin de toucher un maximum de personnes », explique Alain Schuh, expert à ES Énergies Strasbourg et chef de projet bénévole à Électriciens sans frontières.

Ici, sans les ONG, pas d’électricité. Le gouvernement béninois prend en charge l’électrification des arrondissements (grandes villes), mais n’intervient pas dans les villages. Dans un pays où moins de 10 % des zones rurales ont accès à l’électricité, la tâche est immense. « Nous nous occupons surtout des villages les plus isolés, précise Bruno Attolou, fondateur d’ABS ONG. Pour des questions techniques, il faut aussi qu’ils soient ni trop gros ni trop petits. » Wansokou répond parfaitement à ces critères. Dans la journée, des électriciens de Natitingou, la ville voisine, épaulés par Bruno Attolou, Alain Schuh et Yannick Meyer, responsable d’équipe de travaux à Électricité de Strasbourg réseaux et bénévole à Électriciens sans frontières, ont installé deux panneaux photovoltaïques sur les toits de l’école et électrifié deux classes ainsi que le bureau des directeurs. Désormais la vie n’est plus la même au groupe scolaire de Wansokou.


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Elle peut aussi parfois être source de jalousies, de conflits et de pouvoir. Certains villageois voudraient avoir l’électricité chez eux. D’autres aimeraient qu’on installe dans leur maison une cabine de recharge de téléphones portables. Dans chaque village, Électriciens sans frontières et ABS ONG ont en effet prévu de créer un lieu où les habitants peuvent venir recharger leur portable, moyennant une petite contribution (de 50 à 100 F CFA, soit 0,7 à 0,15 euros). Cela devrait générer un revenu permettant de créer un emploi par village et de financer l’entretien des panneaux solaires. Revenu qui s’ajoute à la cotisation (modique) payée mensuellement par l’école (5 000 F CFA, soit 7,6 euros) pendant cinq ans. « Sans cotisation, pas de pérennisation des installations », insiste Bruno Attolou auprès des membres du comité de gestion (créé dans chaque village). Alain Schuh, lui, compte également sur la formation et la sensibilisation afin que les villageois assurent eux-mêmes l’entretien courant : nettoyage des panneaux, remplacement des ampoules, resserrage des vis, etc.

Pour les 408 élèves de l’école et leurs instituteurs, une soirée très spéciale se prépare. Dans la salle de classe des CM2, une lumière blanche éclaire les visages des enfants. « À quoi sert l’électricité ? » leur demande un instituteur. Une forêt de bras impatients se dresse. Les réponses fusent : « Ça sert à faire les devoirs », « aux loisirs », « à marcher dans la nuit », « à voir la route ». La lumière va aussi donner aux enseignants de meilleures conditions de travail. « Avant, confirme Josiane Kouagou, une des deux directrices de l’école, on devait préparer les fiches pédagogiques et corriger les cahiers de devoirs des enfants en utilisant des lampes torches ou des lampes à pétrole. » La soirée se poursuit sur la place du village éclairée depuis fin décembre par un lampadaire installé lui aussi par Électriciens sans frontières et ABS ONG. Enfants et adultes se mettent en cercle et commencent à chanter, puis à danser. « Je déborde de joie. Avec la lumière, Wansokou est devenu un vrai village, lâche fièrement André Winchori, le chef du village. La lumière est source de vie. »

Outre les écoles, Électriciens sans frontières et ABS ONG interviennent dans les dispensaires et dans deux hôpitaux en ville (mise en place de batterie de secours). À quelques kilomètres de Wansokou, le petit village de Tagayè (565 habitants) vient également d’être électrifié. Au milieu des champs de mil, son dispensaire est désormais visible de loin, la nuit. Les gens y viennent généralement pour traiter un paludisme, une infection respiratoire ou une plaie. Ou encore pour accoucher. Philomène N’tcha, aide-soignante et sage-femme, est ravie d’avoir enfin la lumière. « Avant, les accouchements étaient faits à l’aide d’une lampe veilleuse. Maintenant, le travail est plus facile et les gestes sont plus précis. » Et les patients semblent aussi apprécier. « Les gens ont moins peur de venir la nuit. Depuis le 1er janvier, il y a déjà eu cinq accouchements ! » Comme le dit le père Tchansi, prêtre à Wansokou, « tout le monde aspire à la lumière ».

1 Commentaire
  1. OLIVE Robert 9 ans Il y a

    Un grand bravo pour ce reportage, qui démontre qu’avec de petits moyens on peut faire de grande choses. L’accès à l’électricité dans les pays pauvres est un véritable enjeu du 21ieme siècle, et c’est avec fierté qu’Electriciens sans frontières y contribue.

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