À seulement 30 ans, l’agente EDF et championne mondiale handisport succède à Emmanuelle Assmann à la présidence du Comité paralympique et sportif français (CPSF). Elle aura notamment pour mission de préparer les Jeux paralympiques de Paris 2024.
Quadruple championne paralympique en athlétisme et multimédaillée mondiale, Marie-Amélie Le Fur a accédé à la présidence du Comité paralympique et sportif français (CPSF) le 14 décembre dernier. À seulement 30 ans, l’agente EDF, pilote d’affaires développement territorial sur la relation école-entreprise au CNPE de Saint-Laurent-des-Eaux (Loir-et-Cher), succède ainsi à une autre agente EDF, ex-escrimeuse de haut niveau, Emmanuelle Assmann.
Bio express
► Marie-Amélie Le Fur commence l’athlétisme en 1994, à l’âge de 6 ans. Sapeur-pompier volontaire de 12 à 18 ans, elle détient aujourd’hui huit médailles paralympiques, dont trois médailles d’or, et douze médailles mondiales, dont quatre médailles d’or. Ses spécialités sont le 100 mètres, le 200 mètres et le saut en longueur. Elle est membre de la Team EDF.
► À 15 ans, en 2004, Marie-Amélie Le Fur est victime d’un très grave accident de scooter, et doit être amputée de la jambe gauche, sous le genou. Elle reprend la course quatre mois seulement après l’accident.
► En 2005, elle participe à ses premières compétitions handisport. Elle obtient le titre de championne du monde jeune en combiné 100-200 mètres, et celui du 800 mètres, établissant un nouveau record du monde du 800 mètres.
► L’année suivante, elle est triple médaille d’argent aux Championnats du monde d’athlétisme handisport d’Assen (Pays-Bas). Puis les titres s’enchaînent : Jeux paralympiques, championnats du monde et d’Europe, jusqu’en 2018, où elle réalise un nouveau record du monde de saut en longueur lors des Championnats d’Europe de Berlin (palmarès complet sur marie-amelie-lefur.fr).
► En 2011, elle entre à EDF et occupe à mi-temps le poste de pilote d’affaires.
► En décembre 2015, elle est nommée coprésidente, au côté de Teddy Riner, du Comité des athlètes de Paris 2024. L’année suivante, elle est nommée officier de la Légion d’honneur.
► En 2017, elle prend la présidence du comité départemental handisport du Loir-et-Cher. Elle commente plusieurs compétitions sportives à la télévision française.
► Le 14 décembre 2018, elle est élue présidente du Comité paralympique et sportif français (CPSF).
Cette élection à la tête du CPSF est-elle une surprise pour vous ?
Non, pas vraiment, puisque j’avais présenté ma candidature ! J’ai par contre été surprise par l’annonce du départ d’Emmanuelle Assmann. S’en est suivie une période de réflexion, pour savoir si ce poste représentait pour moi un challenge intéressant. Et c’en était un ! La Fédération française handisport (FFH) a ensuite voté pour que mon nom soit proposé à ce siège désormais vacant au conseil d’administration.
Qu’est-ce qui a joué en votre faveur, selon vous ?
Je pense que c’est un tout. Au-delà de la confiance acquise auprès de la FFH et du soutien des fédérations affinitaires, j’ai la chance d’avoir un palmarès en tant qu’athlète et de connaître les structures du mouvement sportif depuis pas mal d’années. J’ai également pris le temps d’appeler les membres du conseil d’administration du Comité pour présenter mes objectifs. Le CPSF sait que je n’arrive pas dans ce mouvement pour tout révolutionner, mais pour continuer le travail entrepris, avec ma vision et mon « empreinte ».
Que pensez-vous apporter à ce mouvement désormais ancré dans le monde sportif ?
Mon dynamisme et ma jeunesse ! Que je vais mettre au service d’un collectif sur lequel je vais pouvoir m’appuyer pour œuvrer. Je suis persuadée que les membres du Comité sauront m’orienter et me conseiller. Car l’important n’est pas de tout maîtriser et de tout savoir, mais bien d’être à l’écoute des personnes qui nous entourent. Ils connaissent bien le mouvement, ils en sont les acteurs au quotidien, et sont, sans nul doute, aptes à me proposer les bons choix pour l’avenir.
Pour une athlète encore « en activité » à la tête d’un mouvement sportif, ce qui est insolite, cette aide est-elle encore plus nécessaire ?
Sans conteste ! Car je pense que c’est une première. Ça ne va pas être simple… Mais j’ai la chance d’avoir une expérience dans le monde industriel depuis maintenant six ans. Je sais donc ce qu’implique de concilier une activité professionnelle, avec des engagements et des objectifs au quotidien, et une carrière sportive. À moi, en fonction des temps forts du poste de présidente, de moduler mes entraînements, dans l’optique des Jeux paralympiques de Tokyo en 2020.
Avec la Nouvelle gouvernance du sport en vigueur très prochainement, l’horizon de Tokyo 2020 puis de Paris 2024… Depuis votre prise de poste, il y a un peu plus d’un mois, les temps forts se succèdent déjà ?
2019 sera l’année de préparation du comité de sélection pour les Jeux de Tokyo pour lesquels nous souhaitons emmener une équipe performante. Mais nous avons surtout et en premier lieu beaucoup de réformes à mener en interne, et des projets en direction des jeunes.
L’un d’entre eux, axé sur la détection des jeunes talents, va être lancé très prochainement en direction des fédérations membres du comité. L’idée est de mettre en place, sur tout le territoire français, des journées spécifiques pour aiguiller des jeunes désireux de se lancer dans la compétition sportive vers les disciplines adéquates, et leur indiquer les fédérations handisport vers lesquelles se tourner pour pratiquer.
En parallèle, nous souhaitons déployer des emplois territoriaux pour être présents en région auprès de l’ensemble des fédérations membres qui œuvrent pour notre mouvement et développent le handisport. Et ce n’est pas chose simple. Car la détection, ça s’apprend ! Tout comme l’accompagnement et la formation.
La mise en place de ce projet implique-t-elle mécaniquement un renforcement des moyens humains et financiers pour les fédérations, et donc les clubs ?
Pas forcément. Il faut également leur donner les moyens pédagogiques et les outils de connaissance pour mieux appréhender les besoins, les caractéristiques de la pratique sportive pour les personnes en situation de handicap. Cela se fera en permettant à tous les acteurs des fédérations membres de fonctionner en réseau, afin de partager leurs expériences et leurs bonnes pratiques.
Du 4 au 9 février prochain aura lieu la 3e Semaine olympique et paralympique (SOP) sur le thème de la mixité. Pouvez-vous nous rappeler quelle est l’importance de cette manifestation ?
L’objectif de la SOP est de promouvoir les bienfaits du sport à travers l’école. Pour cette année, le CPSF souhaite que les actions handicap de la SOP, organisée et coordonnée par Paris 2024, permettent aux jeunes de pratiquer et découvrir nos disciplines paralympiques, mais également de prendre conscience du fait que le handisport existe près de chez eux.
Emmanuelle Assmann vous a donc passé le relais. En tant que sprinteuse, avez-vous la certitude d’avoir pris le bon couloir ?
Emmanuelle nous laisse un bel héritage ! Je suis pleinement consciente des paliers franchis par le Comité paralympique sous sa présidence, notamment des avancées en termes de reconnaissance, de notoriété et de médiatisation du sport handicap, et de la mise en place d’outils pour pérenniser l’activité de l’ensemble de nos fédérations.
Je pense sincèrement que tout ce travail accompli me place dans les meilleures dispositions pour assurer l’avenir du mouvement handisport, au côté d’une équipe motivée et expérimentée, tout en gardant à l’esprit que « tous les acquis restent fragiles ». C’était la formule d’Emmanuelle, et c’est un avis que je partage entièrement.