Quand le Grand Palais voit rouge : l’art soviétique, de Maïakovski à Staline

Quand le Grand Palais voit rouge : l’art soviétique, de Maïakovski à Staline | Journal des Activités Sociales de l'énergie | 73150

Exposition “Rouge. Art et utopie au pays des Soviets”. Sur l’affiche : “ni vers le nouveau, ni vers l’ancien mais vers le nécessaire (l’utile, le besoin).” ©Thibaut Chapotot pour la Rmn-Grand Palais

Dans le sillage de la révolution d’Octobre, un art nouveau voit le jour. Séduits par leurs idéaux, de nombreux artistes se rallient aux bolchéviques. La billetterie des Activités Sociales vous propose un voyage dans cette période trouble, de l’avant-gardisme des premières années à la mise au pas de la création artistique sous Staline. À voir au Grand Palais jusqu’au 1er juillet.

Quand on évoque l’art soviétique, nous revient l’image d’Épinal des tableaux à la gloire de Staline dans les livres d’histoire, montrant le despote entouré d’enfants les bras chargés de fleurs. Des scènes qui prêteraient presque à rire tant leur naïveté offre un contraste saisissant avec le caractère implacable de la dictature stalinienne.

Pourtant, les artistes soviétiques n’ont pas toujours été bridés par la propagande d’État, comme en témoigne l’audace et la créativité des œuvres réalisées dans le tumulte des années 1920. Figure de proue de cet art naissant, le poète Vladimir Maïakovski prône une rupture totale afin de faire descendre l’art de son piédestal et de s’affranchir des conventions bourgeoises.

La variété des pièces exposées donne ainsi à voir l’effervescence qui a agité les milieux artistiques durant cette parenthèse : tableaux, sculptures, extraits de films auxquels se mêlent des objets plus insolites comme cet assortiment d’assiettes ornées de slogans belliqueux tels que « Qui n’est pas avec nous est contre nous » ou encore « Laissons la classe bourgeoise périr, laissons le Capital disparaitre. »

« Le 25 Octobre, Premier Jour », court métrage d’animation (sous-titres anglais)

Première réalisation du maitre de l’animation russe Yuri Norstein, ce court-métrage sorti en 1968 emprunte à l’esthétique avant-gardiste des années 1920, en particulier celles des œuvres de Kouzma Petrov-Vodkine et du peintre cubiste Natan Altman.

1921, année charnière pour l’art soviétique

À l’occasion de l’exposition « 5×5=25 » qui se tient à Moscou en 1921, les peintres exposés proclament la mort de l’art et annoncent renoncer à la peinture sur chevalet. L’individualisme n’ayant pas sa place dans la société nouvelle, un grand nombre de peintres raccrochent les pinceaux pour se tourner vers le théâtre, épicentre de toutes les expérimentations.

Suite à la mort de Lénine en 1924 et la prise graduelle du pouvoir par Staline, les artistes d’avant-garde perdent les faveurs du Politburo au profit des membres de l’AKhRR (Association des artistes de la Russie Révolutionnaire, groupe formé en 1922 par des artistes contestant l’hégémonie de « l’art de gauche », ndlr).

Jugé incompréhensible des masses, l’art abstrait est vertement critiqué. On en revient au traditionalisme qui, une fois adapté aux impératifs de la propagande, s’impose peu à peu comme la norme.

Les escaliers d’Odessa, tirée du « Cuirassé Potemkine », 1925

Bien qu’il soit encore balbutiant, le cinéma n’est pas en reste. Les films de Dziga Vertov et Serguei Eisenstein marque un tournant dans l’histoire du septième art du fait de leur montage dynamique et ambitieux tranchant radicalement avec les conventions narratives à l’époque en vigueur.

La célébrissime scène des escaliers d’Odessa tirée du film de 1925 « Le Cuirassé Potemkine », largement imitée, notamment dans « La Cité de la peur » ou « les Incorruptibles ».

1930 : vers une standardisation

Le suicide de Maïakovski en 1930 laisse augurer la fin d’un idéal. Quatre ans plus tard, Andrei Jdanov, bras droit de Staline, pose les bases de ce qui sera par la suite désigné comme le « réalisme socialiste soviétique ». Toute initiative étant de facto exclue, l’art soviétique se standardise.

Une chape de plomb s’abat sur la plupart des artistes soviétiques, qui ne sont pas épargnés par la répression impitoyable du régime. Certains sont peu à peu évincés des cercles artistiques. D’autres, moins chanceux, sont arrêtés et exécutés lord des Grandes Purges staliniennes comme le peintre letton Gustav Klucis ou Vsevolod Meyerhold, qui avait révolutionné l’art de la mise en scène au début des années 20.

Exposition “Rouge. Art et utopie au pays des Soviets”. Sur l’affiche : “ni vers le nouveau, ni vers l’ancien mais vers le nécessaire (l’utile, le besoin).” ©Thibaut Chapotot pour la Rmn-Grand Palais

La suite de l’exposition est consacrée à l’art soviétique durant la dictature de Staline. À la figure du fiévreux poète, qui dominait la première partie, se substitue celle du Petit Père des Peuples. Dès son arrivée au pouvoir, Staline donne le coup d’envoi d’une modernisation à marche forcée de l’URSS. Le pouvoir cherche à faire de Moscou, ancienne bourgade encombrée, la grande cité futuriste du XXe siècle pour témoigner au monde entier du génie du communisme. Les projets pharaoniques se multiplient comme celui du métro de Moscou, dont la construction est achevée en 1935, ou encore le Palais des Soviets, dont on peut admirer une maquette.

Outre les œuvres à la gloire de Staline, le réalisme socialiste se doit de dépeindre des scènes de la vie quotidienne montrant le bonheur que le communisme a apporté à la population. On remarque que dans cette partie de l’exposition, de nombreux tableaux ont pour thème le sport. En effet, comme dans les autres régimes totalitaires, l’art se fait le relais d’un culte du corps, celui de l’homme nouveau que le régime entend créer.

Ces nouvelles contraintes ont toutefois le mérite d’offrir aux artistes un semblant de marge créative, leur permettant d’affiner leur maitrise du dessin anatomique ainsi que de la représentation du mouvement et de sa dynamique. A l’inverse des œuvres réalisées dans les années 20, celles-ci présentent n’ont d’intérêt que d’un point de vue historique et politique. A quelques exceptions près, elles ne valent en effet pas grand-chose sur le plan esthétique.


Infos pratiques

Exposition « Rouge, Art et utopie au pays des Soviets »Quand le Grand Palais voit rouge : l’art soviétique, de Maïakovski à Staline | Journal des Activités Sociales de l'énergie | 73151
Jusqu’au 1er juillet au Grand Palais

Tarif billetterie : 9 euros (au lieu de 20 euros). Gratuit pour les – de 16 ans.
Clôture des commandes : le 9 juin 2019

Billet valable pour une visite individuelle jusqu’au 20 juin 2019, en accès coupe-file, à la date et à l’heure de votre choix. 

S’y rendre : 3, avenue du Général Eisenhower, 75008 Paris

lien vers billetterie

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