Le Festival d’Energies des jeunes agents électriciens et gaziers a eu lieu à Soulac-sur-mer (Gironde), les 14 et 15 mai derniers. Retour sur deux jours festifs et revendicatifs… à travers l’œil et l’oreille d’un smartphone.
Quand ma propriétaire m’a glissé dans la poche arrière de son sac à dos vendredi 13 mai, de bon matin, j’ai senti dans ses gestes et son attitude un enthousiasme tout particulier, comme si elle attendait ce départ avec impatience depuis un certain temps. Quelques jours auparavant, elle n’avait pas arrêté de composer sur mon clavier des numéros commençant par 05… J’en ai déduit que nous partions vers le Sud-Ouest… La veille, la confirmation est arrivée par sms : un billet de train Paris/Soulac-sur-Mer, via Bordeaux, lui était réservé !
Ma mémoire n’a fait qu’un tour… et les archives du Festival d’Energies 2014 ont aussitôt refait surface : concerts, spectacles, débats passionnés suivis de discussions enflammées, déambulations colorées, dégustations de produits régionaux sur les stands des CMCAS, rencontres improbables immortalisées par des selfies, deux jours intenses étaient à venir !
D’ailleurs, peu après le départ du train, des rires et des chants envahissent l’un des wagons. Ma propriétaire n’est pas la seule à se rendre au Festival d’Energies des jeunes électriciens et gaziers. Une bande de joyeux collègues y ont aussi rendez-vous. Alors qu’il est à peine 11 heures, ils ont déjà sorti charcuterie et fromages et affichent bruyamment leur joie de vivre dans le TGV qui file à travers les vastes plaines de la Beauce. Même la pluie annoncée semble pour l’heure avoir renoncé devant l’entrain de leur jeunesse. Je comprendrai plus tard en les recroisant dans l’enceinte du festival qu’ils avaient de bonnes raisons de prendre un peu d’avance : dès leur arrivée ils ont en effet enfilé les gilets rouges des « régulateurs » et ont rejoint cette équipe de courageux qui se sont relayés aux différentes entrées et points clés du site afin de faciliter l’accès des festivaliers et d’empêcher tout débordement.
D’ailleurs, à notre arrivée vendredi soir, ce sont les régulateurs qui, plan Vigipirate oblige, jettent un œil au sac de ma propriétaire et lui fournissent son badge « tous accès », précieux sésame qui nous permet d’entrer alors que l’ouverture aux festivaliers n’est prévue que le lendemain midi. Je reconnais alors son pas allègre sur les graviers des allées, les bruits des machines de levage pilotées par les bâtisseurs et les invectives des bénévoles qui, à J-1, s’activent frénétiquement pour finir de monter les stands et de préparer les animations. Nous croisons, sur un vélo paré aux couleurs de l’arc-en-ciel, Cédric de l’association Energay. Durant ce week-end, à travers des jeux, des recueils de témoignages, des distributions de préservatifs et d’autocollants « anti-homophobie », ses militants vont contribuer à faire du Festival d’Energies un lieu de mixité et de tolérance où l’égalité des droits entre hétéros, homos, bi ou trans se vit concrètement.
« Un deux, un deux, un deux trois… Tu m’entends, test, test… Allume le micro 2 ! » Nous approchons du stand de la Fédération mines-énergie de la CGT où Gaël est en train de faire les derniers tests pour s’assurer que le studio radio que vont animer de jeunes Messins dès le lendemain est bien opérationnel. « C’est bon, la connexion passe. On peut d’ores et déjà les écouter en direct sur Internet ! » Reste maintenant à sillonner les allées du festival, micro en main, pour recueillir des témoignages, réaliser des reportages et trouver des invités pour les plateaux. « François Duteil a déjà dit oui ! » Demain le président de l’Institut d’histoire sociale parlera sur les ondes de la nationalisation d’EDF-GDF il y a pile soixante-dix ans.
Déjà plus de deux heures que l’on a franchi les grilles de l’entrée et nous n’avons pas fait plus de 200 mètres : les bises claquent, les conversations s’enchaînent, on met un visage sur le nom de la collègue avec qui on échange d’habitude par téléphone, on retrouve de vieux camarades, on se promet de se recroiser le lendemain sans y croire tout à fait car chacun a en tête les allées bondées et l’effervescence de la foule qui aura bientôt envahi cette presque ville aux rues portant les noms de Solidarité, Liberté, Jeunesse, Emancipation ou Suffragettes.
Je sens ma batterie défaillir et m’éteins doucement. Les derniers sons enregistrés sont parasités par bruits de couverts, j’en déduis que nous sommes à la rotonde où toutes les équipes d’organisation se retrouvent pour manger… Nous dinons aux côtés de représentants de FO qui se félicitent de la mobilisation des agents pour défendre les activités sociales et tiennent à faire de ce week end de fête un temps fort de sensibilisation à l’importance de l’engagement dans les luttes, notamment contre la loi dite « travail » qui traversent actuellement le pays.
Il est près de 2 heures du matin quand ma propriétaire me branche sur secteur et me rallume. Elle règle le réveil à 8 heures et me laisse seul sur le coin d’une table dans le calme de la nuit. Je crois sentir l’air marin, iodé et un peu collant de l’océan qui est à moins de deux kilomètres.
Bip, bip, bip… Clac ! Elle vient de me couper le sifflet, je suis bon pour sonner de nouveau dans 7 minutes…
Bip, bip, bip… Cette fois elle se lève et file à la douche ! Elle me replace dans la pochette en filet de son sac à dos, mon discret poste d’observation, et c’est reparti !
Après un rapide tour de chauffe dans les allées encore peu fréquentées, nous nous rendons à l’endroit prévu pour l’arrivée des festivaliers. Un tapis rouge a été installé et devant le stand Rhône-Alpes, une fanfare salue les arrivants. Des Savoyards en tenue de ski leur font une haie d’honneur tandis qu’une fanfare rythme leur entrée. Des sachets de pigments colorés ont été distribués en vue d’un « lancé de couleurs » dans la plus pure tradition des fêtes indienne qui chaque printemps célèbrent la fertilité et la victoire du bien sur le mal ! Certains en font usage sans attendre cette holi, prévue devant la grande scène à 15 h 45 et le jeu est maintenant d’éviter de se transformer en Schtroumpf ou en Martien ! Pas facile : même le président de la CCAS, Michaël Fieschi, en fait les frais, c’est avec un peu de jaune fluo dans les cheveux qu’il prononce le discours de bienvenue !
Tandis que des grappes humaines se forment dans les allées et devant les stands d’où s’échappent d’alléchantes odeurs qui creusent les estomacs, et que les groupes de jeunes agents descendent par vagues des cars qui les ont menés au festival, nous nous dirigeons vers le Magic Mirror. Ce carrousel de bois orné de miroirs est dédié à la culture. Ma propriétaire pose son sac au pied d’un tabouret rouge au centre, sur le parquet. Un débat se prépare, il y sera question des vacances. Quelles sont les (bonnes) raisons de partir dans les centres CCAS, comment faire vivre les valeurs d’émancipation et de solidarité lors de ces moments privilégiés que sont les congés ? Les élus qui participent à cet échange argumentent, expliquent les enjeux de la politique culturelle mise en œuvre, écoutent les questions, les inquiétudes de l’assistance, puis y répondent avec conviction et humilité. L’heure tourne, c’est un peu frustrant de devoir mettre un terme à ces échanges emblématiques du fonctionnement démocratique des Activités Sociales, mais il faut conclure car nous devons courir devant la grande scène pour un rendez-vous coloré.
Pour une fois, nous n’avons pas besoin de nous repérer sur le plan, c’est la musique qui nous guide jusqu’au lieu de l’événement. Quatre, trois, deux, un, zéro, tonne l’animateur dans le micro. Dès le coup d’envoi, des giclées de couleurs s’élèvent au-dessus de la foule et se muent en un gigantesque nuage arc-en-ciel. Les corps et les vêtements des festivaliers sont couverts de poudre colorée, l’air est quasi irrespirable, les jeunes agents exultent, rient, poussent des cris de joie et toussent aussi beaucoup… Cette exultation comparable à celle d’enfants sautant dans des flaques ou jouant dans la boue est d’une grande sensualité.
Infiltrée dans les circuits, la poussière de couleur me perturbe un peu. La cellule de mon appareil photo est teintée de rose pâle… Mes prochains clichés ressembleront à des œuvres de David Hamilton, pensé-je en toute modestie !
En attendant, c’est l’heure du premier concert, Youssoupha et ses musiciens ont investi la scène et le chanteur commence à scander ses premiers textes. Le public survolté entre en véritable communion avec lui, le laissant presque pantois devant un tel accueil en plein après-midi ! Même ma propriétaire, gagnée par l’ambiance, s’est mise à danser, je tressaute à son rythme dans ma pochette… A droite, à gauche… Eh oh, attention, il faudrait veiller à ne pas m’éjecter hors de mon poste d’observation… Oups… Ce que je craignais vient d’arriver. J’ai fait un vol plané et viens d’atterrir sur la pelouse. Le sol meuble labouré par les danseurs a amorti ma chute. Je crois que je suis intact. Apparemment, ma propriétaire ne s’est rendu compte de rien et me voilà seul, cerné de chaussures menaçantes, risquant à chaque instant de finir écrabouillé. Heureusement, quelqu’un me remarque et une main s’empare de moi. Ouf ! Sauvé.
J’entends le jeune homme qui m’a ramassé annoncer à ses potes qu’il a trouvé un portable, l’un d’entre eux lui signale qu’il y a un espace « objets trouvés » et il promet de m’y emmener tout à l’heure… En attendant je me mets en veille, histoire de protéger la vie privée de ma propriétaire. Pas question que des regards indiscrets tombent sur ses photos ou, pire, sur certains de ses textos !
Le rappeur aux textes inspirés par la fraternité termine son concert. Il s’éloigne entouré d’un essaim de fans et laisse la place à la savoureuse comédienne Audrey Vernon, qui présente entre chaque concert un extrait de son spectacle « Comment épouser un milliardaire », dans lequel, en tenue de princesse et sous des airs de midinette, elle nous assène un magistral cours d’économie.
Du fond de la poche du jean de mon sauveur, j’entends les premières chansons de la Grande Sophie, puis, soudain, plus rien. En plein milieu d’un refrain, la chanteuse devient muette, la musique s’assourdit et une rumeur monte dans la foule. Coupure de courant… Le jeune homme qui m’a ramassé cesse de danser, puis s’avance vers le devant de la scène, et franchit les grilles pour accéder au backstage. D’un pas déterminé, il avance entre les bungalows et les camions. Il ouvre une porte, écarte un rideau et pénètre dans un espace plongé dans l’obscurité. C’est ainsi que grâce à cette coupure de courant inopinée, je vais connaître mon quart d’heure de célébrité : nous sommes dans la régie vidéo. Le jeune homme plonge la main dans sa poche et allume mon écran, qui permet d’éclairer un peu la pièce. Chacun retrouve alors ses marques et tandis que les techniciens s’affairent pour réparer la panne, le réalisateur et son équipe peuvent, éclairés par mes soins, sortir quelques minutes sans encombre. Leur pause sera de courte durée, puisque, au bout de quelques minutes, le courant revient et le son repart. Quant à moi, je reste là, posé sur la console, d’où j’ai une vue imprenable sur les mains d’Henri Charles, le maître des lieux, qui, marquant le rythme de la tête et des pieds, pianote sur les boutons et donne ses instructions aux six caméramen qui filment le concert. « Cathy, c’est bien, ne lâche pas la chanteuse, je prends ton plan… Peter, tu élargis un peu le plan sur le public, s’il te plaît… Lionel, resserre sur la batterie, il va attaquer un solo… » : le marathon va durer jusqu’à 2 heures du matin, quasiment sans interruption, pour alimenter en temps réel les deux écrans latéraux encadrant la grande scène.
Tiens, la porte s’ouvre de nouveau, « dépose ce portable à la direction », lance Henri-Charles à l’intrus. Une main inconnue me saisit et je retrouve la lumière du jour… qui commence d’ailleurs à décliner. Sergent Garcia vient de monter sur scène, tandis que je m’éloigne, à mon grand regret. Après quelques minutes de marche, nous arrivons dans un endroit un peu à l’écart, où il faut montrer patte blanche pour entrer. On me dépose dans un grand carton où je retrouve quelques congénères entre autres paires de lunettes, montres, boucle d’oreilles, appareils photo, foulards et colliers.
Autour de moi, dans la grande pièce, une véritable bande de cowboys and girls, talkies-walkies à la ceinture, s’affairent, courent partout pour trouver des solutions à des problèmes aussi divers que variés : une clôture a été pliée et des voitures rentrent sur le site, il faut vite sécuriser l’accès, tel artiste veut pouvoir contrôler la diffusion de ses photos, tel autre est en retard… Visiblement je suis au cœur du centre opérationnel de la fête.
Périodiquement, des mains plongent dans le carton, où le nombre de mes frères d’infortune ne cesse de grossir, brassent frénétiquement les objets qui s’y trouvent, en sortent un, le reposent, déçues, ou alors s’en emparent avec un ouf de soulagement… Il est presque 22 heures quand vient mon tour. Ma propriétaire arrive enfin et sa joie de me retrouver me fait chaud aux batteries. Pour plus de sécurité, elle m’insère dans une pochette dotée d’un cordon qu’elle passe autour de son cou. Nous arrivons devant la grande scène pour entendre les derniers mots du discours du président qui, la voix un peu éraillée, remercie les artistes et se félicite du succès de l’événement, non sans rappeler aux festivaliers l’engagement des bénévoles qui ont permis son bon déroulement. Il a l’air sincèrement heureux de ce moment de partage et ne cache pas son attachement au festival de Soulac dont j’apprendrai qu’il a vécu toutes les éditions.
Alors qu’il quitte la scène, nous nous retournons et apercevons un groupe de girafes roses qui s’avancent avec grâce vers nous. Rien d’une hallucination liée à quelques substances illicites ! Ce final « Sauvage », une création originale mise en scène par Rémy Auda et présentée par les compagnies Karnavires et Off, qui met en scène des danseurs aux costumes tribaux, un déferlement de lumière et de feux d’artifices et ces fameuses girafes aériennes est un pur moment d’émerveillement. Habitées de deux échassiers, les structures translucides fendent lentement dans la foule subjuguée. L’image de ces girafes aux colliers scintillants ne va pas me quitter : ma propriétaire les a immortalisées et la photo est désormais mon fond d’écran.
C’est emplis de cette magie que nous rejoignons le gîte, épuisés mais heureux. Contrairement à son habitude, ma propriétaire ne me branche pas immédiatement. Quand elle me place au fond de sa valise, je comprends que, le lendemain, je ne serai pas de la fête. Soucieuse de ne pas m’égarer de nouveau, elle a décidé de se passer de téléphone. Je ne peux pas lui donner tort, il y a tant de belles rencontres à faire à Soulac qu’il serait dommage de passer son temps le portable collé à l’oreille !
Tags: Festival d'énergies
Bonjour
Le site n’est et ne sera pas vendu .
Le site passera en gestion CE Armée mais sera toujours disponible pour accueillir les énergéticiens et le le festival de soulac .
Cette année il sera fermé pour réaménagement et remise aux normes par le nouveau gestionnaire .
Info donné sur le festival par le président de la ccas à tout les régulateurs pour démentir les ont dit !!!!!
J’ai entendu dire que le site sera loué à l’armée, et réservé à au festival des énergies tout les deux ans, est-ce vrai?
Bonjour!
Pendant le discours du président il me semble qu’ il a mis court à la rumeur et a insisté sur ke fait que Soulac n était pas vendu.
Après c est peut être mes oreilles qui ont voulu entendre cela
En tout cas super festival
Soulac 2016 était pour moi un premier en tant que » Bâtisseur « . En effet après plusieurs fois venu en Festivalier, je voulais connaitre l’histoire de l’autre coté et après plusieurs heures de préparations, de construction de notre stand Normand, après plusieurs heures à servir des verres, des frites, des saucisses j’ai pris un plaisir énorme en servant mes collègues de toues les régions de France. Seulement voilà sachant que le sîte est vendu, je me demande, je vous demande Que ferons nous dans 2 ans ??? Et si il y a un festival de Soulac où pourrons nous le faire ??
Merci de votre réponse,
Cordialement.