Les préoccupations relatives au réchauffement climatique interrogent nos comportements en matière de déplacements. Peut-on continuer à voyager en avion comme si de rien n’était ?
La question n’est pas nouvelle, mais elle prend de l’ampleur. En août dernier, le quotidien « le Soir » rapportait que près d’un Belge sur trois (28,4 %) avait adapté son comportement en matière de voyage en avion par préoccupation pour le réchauffement climatique. Dix pour cent des personnes interrogées affirmaient ne plus du tout prendre l’avion. Les 18-24 ans étaient les plus nombreux à avoir revu leur manière de voyager. Parmi les personnes sensibilisées, 31 % disaient ne plus prendre l’avion pour des distances de moins de 1 000 kilomètres, 27 % se renseignant sur les appareils utilisés par les compagnies.
La tendance n’est pas isolée. Le phénomène du flygskam (honte de prendre l’avion, en suédois) se répand en Europe comme aux États-Unis.
Un quart des Français disent avoir changé leurs habitudes en matière de voyage. Selon l’étude publiée en juillet dernier par le cabinet Protourisme, entre avril et juin, environ 900 000 personnes auraient renoncé à partir à l’étranger. Et 200 000 auraient renoncé à prendre l’avion. Très à l’écoute de ce renversement de tendance, le secteur aérien répète qu’il n’a pas attendu les alertes sur le réchauffement pour prendre des mesures.
Des efforts importants sont faits par les avionneurs pour réduire l’énergie requise sur des vols long-courriers. Ils affirment par ailleurs que l’avion compte pour « 2 % à 3 % seulement des émissions de CO2 » dans le monde. De leur côté, les ONG impliquées dans la défense de l’environnement avancent, elles, le chiffre de 4,9 %. Rappelons qu’un vol Paris-New York ajoute environ une tonne de gaz carbonique à l’atmosphère. Autant que la moyenne annuelle émise par l’activité de chaque citoyen de notre planète.
Des compagnies « responsables »
Organisatrice de séjours en France et à l’étranger, la CCAS s’inscrit dans ce questionnement. Le conseil d’administration a récemment mis en place un groupe de travail dédié aux questions de développement durable. Et fin 2018, un partenariat a été signé avec l’agence de voyages et comparateur de prix en ligne la Bourse des Vols (BDV) pour proposer un service de vente en ligne de billets d’avion au meilleur tarif avec des compagnies « responsables ».
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À tout le moins, les 50 compagnies aériennes proposées par BDV dans le cadre du partenariat avec la CCAS sont reconnues responsables envers les usagers et usagères, leurs salariés et la société : elles n’ont aucun problème connu de sécurité, pas de controverses sociales identifiées ni de pratiques anticonsommateurs avérées, et n’ont connu aucun scandale fiscal ou social. Un an plus tard, la majorité des billets achetés par les agents depuis le lancement de ce partenariat concernent des voyages hors métropole.
Pour autant, difficile de continuer à voler comme si de rien n’était. Alors, taxer, compenser, réduire, économiser ? Ou interroger notre désir de voyage à tout prix (et surtout à bas coût) et contester les normes sociales qui encouragent un transport aérien excessif, les habitudes de voyages lointains, les weekends en avion, etc. ? Ne pas prendre l’avion pour moins de 1 000 km, partir moins souvent, moins loin, c’est le choix opéré par un nombre grandissant de voyageurs tandis que d’autres favorisent des mobilités plus douces. En connaissance de cause, c’est désormais à chacun de répondre.
C’est vous qui le dites !
« C’est comme avec la voiture : on cherche à nous culpabiliser »
Fabien Ratheau, chargé d’affaires postes sources à Grenoble (Isère)
« Pas évident de trancher cette question. Il y a les convictions d’un côté, les envies de l’autre. Aujourd’hui, tout le monde est d’accord sur le constat, mais concrètement on a tous nos petites envies de partir. Un billet d’avion pas cher, moins cher que le train, c’est forcément attractif. Je suis récemment parti en Sicile, au départ de Genève, pour 60 euros aller-retour. Cela coûte aussi cher de descendre dans le Sud en voiture par l’autoroute !
Plutôt que de toujours responsabiliser les usagers, pourquoi ne pas s’adresser aux compagnies et leur demander de faire des efforts ? C’est comme avec la voiture : on cherche à nous culpabiliser. On ne parle d’ailleurs pas beaucoup du transport maritime qui pollue pourtant beaucoup plus. »
« Pour voyager loin, difficile de faire autrement »
Bernard Savariau, agent retraité, CMCAS Dauphiné Pays de Rhône
« En étant très investi dans l’organisation des voyages solidaires, notamment au Laos, je suis sensible à cette question. Beaucoup de voyageurs solidaires se la posent aussi. Mais pour voyager loin, difficile de faire autrement. Dans notre association, nous proposons à ceux qui le souhaitent de payer une compensation carbone. L’argent est ensuite reversé à un organisme promoteur de projets de développement.
Par ailleurs, nous essayons d’inciter aux longs voyages et d’éviter les courts. On voit de plus en plus d’offres de week-ends de trois jours à bas coût en Europe, il faut essayer d’y résister. Si on reste en France, on doit opter pour le train et le covoiturage. »
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