À la recherche d’un coin paradisiaque au cœur de l’Auvergne où l’on peut garder un œil sur l’actualité sociale ? Bienvenue à Saint-Amant-Roche-Savine, que la compagnie Jolie Môme investit chaque été. Et avec la CCAS et la CMCAS Clermont-Le-Puy, c’est gratuit pour les agent·es.
« Dis, tu peux me passer 10 brick, je voudrais m’acheter un truc à manger ? »… Détromper vous cette phrase ne sort pas de la bouche de quelque milliardaire, et le petit paradis où nous nous trouvons n’a rien à voir avec l’exil fiscal ! Nous sommes à Saint-Amant-Roche-Savine, au cœur de l’Auvergne. C’est dans ce village du Puy-de-Dôme que depuis plus d’une décennie, la compagnie Jolie Môme s’établit le dernier week-end du mois de juillet pour le festival La Belle Rouge.
Au programme : des spectacles sous les trois grands chapiteaux montés par des bénévoles, créations originales ou coups de coeur militants de la compagnie, des concerts, un village associatif, des débats, des performances et des spécialités locales à déguster… Et même une monnaie locale, les fameuses brick (vendues 1,20 euros l’une), qui remplace les euros sur toute la durée de l’événement. « Depuis deux ou trois ans, les commerçants du villages jouent le jeu avec nous. On peut même acheter son pain ou boire un verre à la terrasse du « Savine », l’unique café du village, en payant en bricks », précise l’un des organisateurs. Et grâce au partenariat entre la CCAS, la CMCAS Clermont-Le-Puy et le festival, les agent·es et leur famille bénéficient de la gratuité pour tous les spectacles. « Une véritable aubaine dont près de 150 bénéficiaires ont pu profiter cette année », précise Christiane Boyenval, élue à la CMCAS.
Surplombant le bourg, le centre de vacances Saviloisir composé de bungalows et d’emplacements pour les campeurs, affiche plus que complet : conventionné avec la CCAS mais aussi avec le comité d’entreprise des cheminots et la mairie du village, il est très prisé quand arrive le festival : une cinquantaine de familles d’agents des Industries électriques et gazières y sont hébergées en cette fin du mois de juillet. L’occasion de se retrouver entre habitué·s qui pour rien au monde ne rateraient ce rendez-vous annuel, comme nous l’explique Jean-Marc Mandin, agent EDF à Marseille et qui vient depuis plus de huit ans : « Ici, on peut discuter avec les artistes et d’autres citoyen·nes, engagé·es ou pas, avec nos camarades énergéticien·nes, cheminot·es, intermittent·s, enseignant·es… avec qui nous avons des combats communs. J’y ai vu « Merci patron » en avant-première et en présence de son réalisateur François Ruffin, j’y ai rencontré des camarades de Michelin en lutte pour leur emploi… » Côté luttes, Jean-Marc n’est d’ailleurs pas en reste :
« Cette année, je suis venu avec les copains de la coopérative Fralib, auxquels je donne un coup de main sur leur stand pour vendre leur thé 1336. Nous, agent·es EDF, les avons accompagnés dans leur lutte, et on est fier·ères de témoigner de ce combat victorieux. Cela donne de l’espoir aux autres. Nos expériences, il faut les partager et les faire vivre, et expliquer que les conquêtes sociales ne se gagnent que dans la lutte ! »
Si le bien commun était particulièrement mis en lumière lors de cette édition 2018, c’est aussi parce que le collège de Saint-Amant est menacé de fermeture par le département… La cour de cet établissement public s’est transformée en un lieu de vie où les rencontres et les échanges ont duré jusque très tard dans la nuit ! Symboliquement, les artistes l’ont donc investie pour y donner des spectacles, y loger et y préparer les repas pour les membres de leurs équipes et pour les festivaliers.
Une vieille et belle histoire
Au programme cette année, on pouvait assister entre autres à un superbe duo-performance consacré à la vie d’Édouard Berneys, neveu de Freud et inventeur de la manipulation de masse, ironiquement intitulé « Un démocrate » ; au traditionnel cabaret de la compagnie Jolie Môme, dénonçant en chansons avec une énergie sans pareille, les affres de la société néolibérale ; et de participer à un grand débat sur la défense des services publics, notamment en milieu rural, réunissant électricien·nes et gazier·ères, cheminot·es, enseignant·es, personnels du secteur de la santé, élu·es locaux et locales.
Pièce « Un démocrate » de la compagnie Idiomécanic Théâtre, texte et mise en scène Julie Timmerman.
Parmi les intervenant·es de ce débat, Alain Molimard, ancien agent EDF et ex-président de la CMCAS Clermont-Le-Puy, a ainsi précisé les enjeux de l’accès à l’énergie pour tous. « C’est une vieille histoire entre les membres de la compagnie Jolie Môme et nous, précise Alain, qui a initié le partenariat. Ils et elles ont toujours été présent·es lors des manifs que nous organisions à Paris, on s’identifie aux textes de leurs chansons… Ils et elles ont un avis éclairé sur l’actualité, et le fait qu’il s’exprime par la chanson et le spectacle permet de passer des messages de manière plus facile. » Et de profiter de l’occasion pour rappeler aux agents « qu’à chaque rentrée, il faut se battre pour conserver nos acquis et la possibilité de venir en vacances dans des endroits comme celui-ci à des prix raisonnables. »
Ce partenariat de 10 ans s’est élaboré à partir de luttes locales dans lesquelles la compagnie Jolie Môme a été présente. Les agents rattachés à la CMCAS ont été conviés aux différents débats organisés par la compagnie, notamment sur l’accès à l’énergie en milieu rural menacé par les privatisations ou encore la défense des services publics…. Depuis ce premier contact fructueux avec la CMCAS, la CCAS accorde désormais une subvention au festival qui est dès lors ouvert à tou·tes les agent·es : celles et ceux de la région qui viennent en voisin·es, qui résident au centre de vacances conventionné Saviloisir ou dans l’un des campings (« lève-tôt » ou « couche-tard ») mis en place dans le village pour l’occasion. Certain·es se sont même inscrit·es au tableau des bénévoles pour aider au montage et au démontage des chapiteaux, amenées dans d’impressionnants camions par la compagnie Jolie Môme, ainsi qu’à l’organisation de cet évènement qui, le temps d’une quinzaine de jours, fait de Saint-Amant-Roches-Savine le centre du monde.
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