Science-fiction, anticipation, Fantasy… Genre mineur pour les uns, de haute volée pour les autres, la littérature de l’imaginaire n’admet aucune entrave. La liberté absolue qui la caractérise lui autorise l’exploration du surnaturel, mais son univers se fonde malgré tout sur le réel… Julien Guerry, ancien libraire, spécialiste de science-fiction, en dévoilera les contours dans vos villages vacances l’été prochain.
Qu’est-ce que la littérature de l’imaginaire ?
Julien Guerry – C’est une littérature qui, par rapport à la littérature blanche (ou littérature générale, par opposition à la littérature de genre, ndlr), fait un pas de côté dans la réalité. Ce décalage permet d’obtenir un autre éclairage, d’envisager les choses différemment, d’appréhender le monde sous une autre forme.
La littérature de l’imaginaire s’ancre dans le quotidien, nous parle des choses qui nous concernent : elle s’appuie sur le monde réel, s’inspire des sciences humaines, mais s’affranchit de tout. Cette abstraction des lois de l’ordinaire lui procure une liberté absolue qui lui offre le champ de tous les possibles. Dès lors, on peut tout inventer, tout créer. C’est inépuisable.
Comment ce genre a-t-il évolué ?
J. Guerry – La littérature de l’imaginaire repose sur les mythologies et les légendes. Elle reprend souvent le mythe du héros éternel, remis au goût du jour. La Bible est sans doute le premier livre du genre ! Voltaire a par exemple publié en 1752 son conte philosophique, « Micromégas », qui raconte l’histoire de deux géants, Micromégas, venu d’une planète de Sirius, et le secrétaire de l’Académie de Saturne.
Aux États-Unis, entre les deux guerres mondiales, la science-fiction fait la part belle aux surhommes dotés de pouvoirs, aux supers héros. Leurs aventures sont publiées sous forme de romans feuilletons dans des revues populaires. Mais la figure du super héros ne marche pas en Europe. Il faudra attendre les années 1960, le développement de la technologie et des sciences pour voir arriver en Europe les grandes sagas américaines de science-fiction.
Les univers singuliers de la littérature de l’imaginaire peuvent délivrer un message militant en dénonçant les travers de nos sociétés.
En quoi la littérature de l’imaginaire aiderait-elle à mieux comprendre le monde ?
J. Guerry – Grâce à cet écart, à ce décalage, le lecteur est plongé dans toutes sortes de sociétés, il est amené à explorer des mondes différents. Ces univers singuliers n’empêchent pas de réfléchir ni de s’interroger. Bien au contraire, ils peuvent délivrer un message militant en dénonçant les travers de nos sociétés. Car rien ne sépare un bon livre de science-fiction d’un bon roman.
Comment expliquez-vous l’engouement pour ce genre de littérature ces dernières années ?
J. Guerry – On constate effectivement une appétence particulière pour la littérature de l’imaginaire depuis ces trente dernières années. D’abord, il y a ce que l’on appelle la génération « Harry Potter », qui s’est intéressée à la lecture par le biais de ce conte fantastique. C’est un lectorat fidèle, exigeant qui continue à lire ce genre de livres.
Puis, avec cette remise au goût du jour de l’imaginaire, les œuvres des grands auteurs étrangers du genre (Tolkien par exemple, auteur du « Seigneur des anneaux ») ont fait l’objet de nouvelle traduction plus fidèle à l’originale où la qualité du texte et l’exigence de l’écriture sont mises au jour.
Quel regard portez-vous sur la politique culturelle de la CCAS ?
J. Guerry – C’est assez extraordinaire ! J’apprécie cette approche qui consiste à aborder la lecture en créant un contexte favorable. Car, avouons-le-nous, c’est parfois angoissant pour des gens qui n’ont pas l’habitude de lire, d’entrer dans une librairie ; ils peuvent se sentir mal à l’aise dans un univers qui ne leur est pas familier. Je fais le parallèle avec mon état lorsque je suis dans un magasin de bricolage, que je suis perdu parce que je n’y connais strictement rien !
Les rencontres avec les auteurs organisées par la CCAS incitent les bénéficiaires à entrer en contact avec le livre et son auteur. Ces rencontres participent à désacraliser le fait de lire. Je suis toujours étonné des échanges fructueux avec le public. Souvent ce sont les enfants, toujours curieux, qui traînent leurs parents… Au bout d’un moment, les premiers partent et les parents restent à discuter avec les écrivains.
Retrouvez Julien Guerry dans vos villages vacances : le 25 juillet au Pradet (Var), le 26 juillet à Bormes-Les-Mimosas (Var), le 27 juillet au Lavandou (Var), le 28 juillet à Saint-Raphaël (Var).
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