Agen : du théâtre pour prévenir le harcèlement scolaire

"La cour des grands", théâtre participatif avec la CMCAS Agen et la compagnie Chamboulé

« La cour des grands », théâtre participatif avec la CMCAS Agen et la compagnie Chamboulé. ©Pierre Charriau/CCAS

Où finit le jeu, et où commence le harcèlement ? Autour du spectacle « Dans la cour des grands » et de jeux de rôles, les jeunes bénéficiaires de la CMCAS Agen ont a appris, aux côtés de leurs parents, à reconnaître cette violence et à la dénoncer.

« Ce n’est pas un sujet facile, mais parler de choses difficiles est inscrit dans notre ADN, soutient Jacques Clési, président de la Commission action sanitaire, sociale et proximité à la CMCAS Agen. On a pensé que la rentrée représentait le meilleur moment pour programmer ce spectacle sur le harcèlement scolaire. La prévention fait partie de nos prérogatives. »

Le 24 septembre dernier, un samedi, accompagné des actrices du Théâtre du Chamboulé, Jacques Clési a accueilli autour d’un café les bénéficiaires qui arrivaient avec leurs enfants au Passage, une commune voisine d’Agen. Voilà six ans que la troupe toulousaine joue la pièce Dans la cour des grands dans des théâtres et des écoles. « Nous l’avons élaborée à partir d’ateliers d’écriture menés dans des écoles primaires. Le harcèlement commence dès la petite enfance », dénonce Martine Dargent, la metteuse en scène.

Les enquêtes révèlent qu’un enfant sur dix en serait victime et que la plupart n’en parlent pas au moment des faits. Les conséquences peuvent être très graves, surtout depuis le développement des réseaux sociaux qui décuplent la force de frappe des harceleurs.

« Je ne pensais pas que j’allais pleurer »

Les situations décrites dans la pièce sont racontées telles que les enfants les ont vécues. « Nous avons pris le parti de parler du harcèlement du point de vue des témoins qui assistent aux persécutions », enchaîne Martine Dargent. Dans la pièce, Zoé ne supporte plus de voir Paul, victime de harcèlement parce qu’il est le premier de la classe, subir brimades et vexations. Un jour, il ne vient plus en classe…

K. T., dont le mari travaille à la centrale de Golfech (Tarn-et-Garonne), a témoigné des violences que sa fille C., 8 ans, a endurées. Sa voix tremble. « Je ne pensais pas que j’allais pleurer », lâche-t-elle dans un sourire voilé de larmes. Et K. de rappeler que sa fille ne lui avait jamais parlé de ce qu’elle vivait. Elle-même n’avait rien vu. C. avait des problèmes de santé que les médecins n’expliquaient pas.

Une scène pendant le spectacle a fait écho à ce que la petite fille a subi, quand « sa meilleure amie vidait son cartable dans la cour et la tapait ». Les faits se sont déroulés il y a un an. Si C. n’est pas tout à fait guérie, aujourd’hui elle n’attend plus pour parler de ce qu’elle vit. Elle a participé aux jeux de rôle, passant rapidement de la timidité au jeu et à la joie. Au moment de monter dans la voiture pour rentrer, elle a lancé : « Maman, c’était trop bien ! »

« On ne va pas à l’école pour se faire embêter »

Tantôt acteurs, tantôt spectacteurs, les enfants peuvent expérimenter grâce au théâtre des situations de harcèlement ordinaires, et apprendre à réagir y sainement, qu’ils en soient victimes ou témoins. ©Pierre Charriau/CCAS

À la fin de la représentation, selon les principes du théâtre-forum, les enfants sont en effet invités sur scène pour participer à des jeux de rôle, où ils sont tantôt harceleurs, tantôt témoins. Les comédiennes leur ont demandé de partager leurs réflexions et surtout leurs solutions, faisant émerger en eux le message primordial : ne jamais laisser la victime seule face à ses agresseurs.

L. M., dont le mari travaille lui aussi à la centrale de Golfech, est présente avec sa fille G., en classe de CE1. Elle pense que c’est le moment de la sensibiliser au harcèlement, pour qu’elle apprenne à le détecter et le reconnaître. Qu’elle sache quoi faire et qui contacter le cas échéant. « On ne va pas à l’école pour se faire embêter », répète-t-elle inlassablement.

L. fait partie d’une association de parents d’élèves, où le harcèlement est un sujet fréquemment évoqué et soulève de multiples questions : « À partir de quand parle-t-on de harcèlement ? À partir de combien de fois ? Parfois, ce n’est pas le même qui harcèle. Il faut réagir, sinon on banalise ! » À l’issue du spectacle, L. M. a particulièrement apprécié que les enfants puissent devenir acteurs à leur tour. « C’est important qu’ils se mettent en situation dans des cas qu’ils ont vus ou entendus. C’est utile et ça leur apprend à jouer collectif ! »

Les situations de harcèlement vécues par les jeunes à l’école sont sources de mal-être qu’il n’est pas toujours évident de communiquer pour les enfants. ©Pierre Charriau/CCAS

C’est Angélique Costa, technicienne séjours activités, qui a suggéré le spectacle à la CMCAS. Mère de deux garçons, qui, « sans être harcelés ont été embêtés », elle sait à quel point il est difficile de « trouver les bons mots, de savoir quoi faire pour soutenir [les enfants] ». C’est dans cette démarche de soutien et de solidarité que la CMCAS a retenu sa proposition. Pour Michelle Bonadéo-Salmon, administratrice, il « est important d’aider les bénéficiaires à mieux comprendre notre société. Cette démarche est éducative et s’inscrit dans notre tradition d’éducation populaire ».

 

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