Face à la vague de privatisation du vaste espace d’échanges que fut le web à son origine, et la fin de l’illusion de sa neutralité, les citoyens reprennent l’initiative sur la Toile.
La démocratie de participation est soit un correctif à la gestion des représentants élus, soit l’association de tous à l’élaboration de la décision. Dans le second cas, il faut donc construire des débats, organiser des confrontations, essayer de dépasser les approches limitées. Pour l’historien et sociologue Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France, « c’est peut-être de cette façon qu’Internet peut intervenir le plus utilement dans la vie démocratique, en tant que grand forum ouvert et permanent ». Et c’est, peut-être, ici le point de rencontre entre le numérique et l’éducation populaire, sur laquelle depuis un siècle le mouvement syndical, celui de la culture pour tous, des mouvements de jeunesse, le tourisme dit social s’appuient. Un ensemble de pratiques de coconstruction, d’être au monde et aux autres dans une posture d’apprentissage et d’émancipation.
Mise en commun des savoirs
C’est aussi, peut-être, le moment. Le mouvement citoyen tente de refaire son retard sur la privatisation du web. On voit ainsi apparaître des formes de mise en commun des savoirs comme les fablabs ou les civic halls. Les fablabs sont des lieux ouverts d’échanges, de création et de fabrication numériques de logiciels ou d’objets. Ils répondent à une charte mondiale. L’association Ars Industrialis, animée par le philosophe Bernard Stiegler, a noué un partenariat avec la communauté Plaine Commune de Seine-Saint-Denis pour ouvrir, en janvier 2017, des ateliers de l’économie contributive (fonctionnalités de la ville, services publics, création d’architecture de réseaux locaux). Le projet vise également à expérimenter les bases d’un revenu contributif pour un groupe de jeunes de 16 à 25 ans. Après New York ou Madrid, la maire de Paris, Anne Hidalgo, a annoncé la création d’un civic hall parisien. « Cet endroit fonctionnera comme un incubateur, précisait-elle en juin dernier. Un lieu de rencontre, de dialogue, voire de coconstruction des politiques municipales, qui implique une profonde réorganisation de l’administration. »
Les nouveaux territoires de la démocratieInstitutionnelles ou citoyennes, en assemblées, sur le Net ou les réseaux sociaux, de nouvelles pratiques démocratiques viennent bousculer la prise de parole, la gestion municipale et jusqu’au travail.Voir l’ensemble du dossier |