« Les Larmes du Reich » : un polar historique teinté de gris

François Médéline, auteur des Larmes du Reich, choisi par la CCAS pour sa dotation lecture 2023 et pour animer les Rencontres culturelles estivales.

François Médéline, auteur des Larmes du Reich, choisi par la CCAS pour sa dotation lecture 2023 et pour animer les Rencontres culturelles estivales. ©Vincent Loison

Après « La Sacrifiée du Vercors », François Médéline signe un deuxième polar historique, « Les Larmes du Reich », qui se déroule six ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale. S’appuyant sur une intrigue haletante, l’auteur sonde les méandres de l’âme de personnages tout en nuances de gris, encore marqués par le conflit. Un livre choisi par la CCAS pour sa dotation lecture 2023.


Les larmes du Reich, de François MEDELINE, ed 10-18L’histoire

En mars 1951, les époux Delhomme, paysans sans histoires, ont été sauvagement tués dans leur maison à Crest, un village de la Drôme. Crime opportuniste d’un voleur ou meurtre prémédité ? Plus intrigant encore, Juliette, leur fillette de 11 ans, s’est volatilisée sans laisser de traces… Spécialisé dans la recherche des enfants disparus, l’abscons inspecteur Michel est bien décidé à lever le voile sur les mystères qui entourent le double meutre. Jusqu’à déterrer les cadavres de l’après-guerre…

« Les Larmes du Reich », de François Médéline, Éditions 10/18, 2022.

À lire en accès libre sur la Médiathèque des Activités Sociales et à commander sur la Librairie des Activités Sociales : 11,18 euros au lieu de 14,90 euros (tarif CCAS, frais de port offerts ou réduits, connexion au site ccas.fr requise).


François Médéline : « La morale est un concept philosophique inventé pour temps de paix »

Drôle de type que l’inspecteur Michel. Qui est cet énigmatique enquêteur ?

François Médéline – Inspecteur à la brigade criminelle de Lyon, Michel est spécialisé dans la recherche des enfants disparus. Il part dans la vallée de la Drôme pour enquêter sur la disparition de Juliette, une fillette dont les parents ont été assassinés. Le récit se passe en mars 1951, on est toujours dans les cendres de la Seconde Guerre mondiale.

L’inspecteur est un homme froid mais très agité. On ne sait pas trop ce qu’il fait. Il se déplace à vélo, il est toujours en train de pédaler. Il n’a pas d’émotions et peu de sentiments. Il ne s’interroge jamais sur lui-même. On n’a pas accès à ses pensées intimes. On sait qu’il prie beaucoup. Mais Michel est animé d’une quête plus personnelle, que va dévoiler le roman. Je ne peux donc pas en dire plus !

Que vous importe-t-il de montrer de vos personnages ?

On dit que j’écris du roman noir. Je trouve l’expression inexacte. J’ai plutôt l’impression d’être dans le gris. J’aime bien montrer des salopards qui se comportent bien et des gentils qui agissent très mal. C’est justement cette complexité qui fait la permanence de l’humanité.

Dans le polar historique, on confronte les gens à des événements dramatiques. C’est dans des moments forts que se révèle la vraie personnalité des individus. Mes personnages sont toujours des individus un peu gris. J’aime assez être sur cette ligne de crête, qui me paraît intéressante.

Mes héros sont complexes, souvent froids, puis ils se réchauffent au fur et à mesure de l’intrigue. Agissent-ils bien ou mal ? Il est compliqué de les juger. La morale est un concept philosophique inventé par grand beau temps pour temps de paix, car, dans les situations historiques extrêmes, ce genre de chose n’existe plus.

La trame des « Larmes du Reich » repose sur le secret. Qu’aimez-vous dans le secret ?

Ce qu’il génère comme actions souvent négatives. Le secret est en fait le thème principal de mes romans. C’est un ami qui me l’a fait remarquer. Les secrets, de famille notamment, et le mensonge sont des sujets familiers et personnels qui reviennent dans mes livres, que je mobilise tout le temps presque involontairement. Il y a toujours des lecteurs pour me le faire remarquer : « En fait, c’est un livre sur le secret… » Pourtant, je déteste le mensonge. C’est un problème dans la vie, car il faut parfois mentir pour ne pas faire souffrir les gens.

Des rebondissements sont-ils le gage d’un bon polar ?

Non, je ne crois pas. J’utilise rarement ce genre de ressort normalement. Dans « Les Larmes du Reich », je m’efforce justement de ne pas trop donner d’indices : on ne trouve les clés de l’énigme qu’à la fin du roman. J’essaie d’écrire des livres dans lesquels je laisse au lecteur une certaine forme de liberté : il peut se projeter, laisser libre cours à son imagination. De ce fait, mon roman devient un objet différent selon le lecteur qui participe à le construire.

Néanmoins, la liberté peut faire peur. Certains lecteurs préfèrent un cadre, retrouver des codes, être guidés, consolés. Moi, je propose une littérature un peu plus abrasive. Très cinématographique. Je m’inspire des techniques purement descriptives des pères du roman noir américain, dans lequel il y a des dialogues et de l’action. On n’entre pas dans la tête des personnages. Il n’y a pas d’introspection. Libre à chacun d’interpréter.

La psychologie de l’inspecteur Michel, par exemple, est celle que le lecteur lui attribue, au regard de ses propos et de ses agissements. Si j’entrais dans la tête de l’inspecteur, je devrais mentir au lecteur. Sinon, dès le début, le lecteur connaîtrait la fin de l’histoire. Or, l’intérêt du livre réside dans ce que motive sa présence.

Vos deux derniers romans se situent dans la période de l’après-guerre. Qu’est-ce qui vous intéresse dans cette période ?

L’organisation du monde actuel trouve son origine dans la Seconde Guerre mondiale. Quand Poutine attaque l’Ukraine, il parle de « dénazifier » les Ukrainiens. La référence renvoie toujours à cette période. Je pense que la Seconde Guerre mondiale est la matrice de la pensée politique occidentale contemporaine. On est toujours dedans. C’est un élément passionnant à aborder.

Mais je m’attache à aborder des thèmes qui vont à l’encontre du grand récit national, qui sont critiques. J’entends par là : les nazis sont le diable ; nous avons gagné la guerre avec les Anglais et les Américains. C’est un peu plus compliqué que cela. Tous les nazis n’étaient pas des psychopathes. Et le nazisme est bien plus complexe. Lorsque Hannah Arendt l’a déclaré, c’était difficile à entendre, on l’a beaucoup critiquée.

Vous avez une passion pour le roman noir. Qu’est-ce qui vous fascine là-dedans ?

James Ellroy. Je l’ai lu quand j’avais 19 ans. Depuis, je suis fasciné par cet écrivain. J’écris de cette façon parce que j’ai lu cet auteur. J’apprécie aussi la dimension historique et politique assez présente dans ses livres.


Des livres à lire, des auteurs à rencontrer

"Les Larmes du Reich" : un polar historique teinté de gris | Journal des Activités Sociales de l'énergie | culture 2023Tout l’été, retrouvez les livres de la sélection littéraire CCAS dans les bibliothèques de vos villages vacances, et rencontrez leurs auteurs au cours des Rencontres culturelles estivales.

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