Ludovic Torbey, co-auteur avec Stéphane Lambert du livre « Osons comprendre. L’avenir de l’énergie ». Source : capture d’écran YouTube

Co-animateur de la chaîne YouTube « Osons causer » et du site Internet « Osons comprendre », Ludovic Torbey publie « L’Avenir de l’énergie ». Un livre construit comme un manuel de survie sur les chemins d’un domaine touffu, aussi complexe que crucial.

Bio express

Crise et indépendance énergétiques, énergies renouvelables, réchauffement climatique, nucléaire… En parallèle de leur chaîne YouTube Osons causer, qui décrypte l’actualité depuis 2015 et cumule 30 millions de vues, Ludovic Torbey et Stéphane Lambert ont créé le site internet d’information Osons comprendre : celui-ci propose entre autres des dizaines de vidéos sur le thème de l’énergie, réalisées avec beaucoup de pédagogie, dont certaines sont en accès libre.

Nous avions rencontré Ludovic Torbey en 2021, lorsqu’il avait mis en ligne sa vidéo sur le projet Hercule (alors peu connu du grand public), une vidéo qui avait conquis près de 130 000 internautes. Désormais coauteur d’un livre sur L’Avenir de l’énergie, l’ancien étudiant de l’École normale supérieure reste persuadé que la politique énergétique doit être au cœur d’un débat citoyen, qu’il tente avec son acolyte, Stéphane Lambert, de rendre le plus accessible possible.

Pourquoi écrire un livre, en parallèle de votre chaîne YouTube et du site Internet ?

Parce qu’en 2022 on a subi un choc. Depuis plus de quarante ans, la France avait une électricité abondante, largement décarbonée, et la moins chère d’Europe. Et en 2022 on s’est rendu compte qu’on pouvait manquer d’électricité au point de devoir en importer, que le prix de cette énergie pouvait exploser et les factures flamber, au point d’entraîner des suppressions d’emploi, des fermetures d’entreprises.

Il était donc nécessaire de faire un état des lieux, aussi fouillé et didactique que possible, pédagogique, sous forme d’un livre maniable, de la situation de notre système énergétique et des défis auxquels il est confronté, recensant les moyens d’y répondre, leurs avantages et leurs inconvénients.

Car cette situation n’est pas conjoncturelle. C’est le signal d’un immense défi à relever dans les années à venir. Premièrement, sortir des énergies fossiles. Ensuite, rebâtir un mix énergétique capable de répondre à la hausse de nos consommations en électricité qui va découler des transferts d’usage, notamment dans les transports, le chauffage des bâtiments et l’industrie. Ce qui représente plus de 30 % de production d’électricité supplémentaire d’ici à 2050, comme le prévoit un rapport de RTE. C’est énorme !

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Mais l’actualité pour des millions de foyers et d’entreprises, c’est la flambée des factures !

Demain, avec les transferts d’usage massifs des énergies fossiles vers l’électricité, la facture d’électricité correspondra à plus de 80 % de la consommation énergétique d’un foyer. Les enjeux sociaux et de compensation des inégalités poseront forcément la question du rôle de la régulation publique et de l’acceptabilité du prix de cette énergie pour les particuliers et l’ensemble de l’économie.

Vous consacrez un chapitre à l’« effet falaise ». C’est quoi au juste ?

Face au vieillissement des centrales nucléaires, qui produisent 70 % de notre électricité, la France peut perdre très rapidement une grande partie de ses moyens de production. C’est cela, l’effet falaise. La prolongation de leur durée de vie ne nous épargnera pas de rebâtir complètement notre système électrique dans les vingt ou trente ans à venir. Un défi colossal !

Et c’est aujourd’hui qu’il faut s’y mettre, en sortant des postures pronucléaires et prorenouvelables. Des solutions existent. Dans le livre, on en propose un état des lieux, en montrant, de façon didactique, leurs mérites et leurs inconvénients. Le mix énergétique embarquera plein de solutions, dont la sobriété et l’efficacité énergétiques.

Quelle différence faites-vous entre sobriété et efficacité énergétiques ?

L’efficacité énergétique, c’est rendre un service d’égale efficience pour une quantité d’énergie moindre. L’exemple éclatant, c’est la voiture électrique. Un moteur thermique convertit de la chaleur en mouvement, mais beaucoup de l’énergie contenue dans le carburant est perdue. Dans un moteur électrique, il n’y a pas cette perte. Les mêmes 100 kilomètres à parcourir vont exiger moins d’énergie avec l’électrique. Ça, c’est l’efficacité.

La sobriété, c’est renoncer à des usages ou à certains services, dans le but de diminuer sa consommation ou son empreinte environnementale. Il faut que cela soit volontaire, pas subi. Y renoncer parce c’est trop cher, ça, c’est de la pauvreté énergétique ! Or les plus pauvres dépensent beaucoup moins d’énergie que les plus riches aujourd’hui.

Selon vous, le niveau de conscience et de connaissance de ces enjeux énergétiques a-t-il progressé ?

En cinq ans, le débat a en effet progressé et s’est élevé dans la société, qui s’est emparée de ces sujets. La guerre en Ukraine et la crise de la Covid ont porté au-devant de la scène les questions de souveraineté et d’indépendance énergétiques. Le niveau monte, même si le débat politique plafonne.

J’espère que notre livre et notre production contribueront à la diffusion de l’info. C’est très important que les citoyens ne subissent pas ces questions, et s’emparent des termes du débat dans sa complexité.