Nos coups de cœur | Zoom sur les millennials et l’Amérique de Trump

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Christophe Deroubaix, auteur de « Millennials, la génération qui secoue l’Amérique », présente son livre dans les villages vacances dans le cadre des rencontres culturelles. ©Christophe Deroubaix

Plus progressistes, plus métissés et plus diplômés que les générations précédentes, les jeunes Américains peuvent-ils faire chuter Donald Trump ? Entretien avec Christophe Deroubaix, auteur de « Millennials, la génération qui secoue l’Amérique ».


Nos coups de cœur | Zoom sur les millennials et l’Amérique de Trump | Journal des Activités Sociales de l'énergie | 92247 Millenials« Millennials, la génération qui secoue l’Amérique », de Christophe Deroubaix, éd. de l’Atelier/Apple Books, 2019, 160 p.
À retrouver dans les bibliothèques des villages vacances

En accès libre sur la médiathèque


« Aux États-Unis, chaque génération est un nouveau pays », écrivait Tocqueville. La quatorzième génération américaine, les « millennials » (ou « génération Y »), nés entre 1981 et 1996, lui donne raison. Saura-t-elle mener une « révolution politique » en assurant la défaite de Donald Trump lors de la présidentielle de 2020, et en permettant la mise en œuvre du programme le plus radical depuis le New Deal ?


Qui symbolise le plus selon vous cette jeune génération qui « secoue l’Amérique » vieillissante de Donald Trump ?

Christophe Deroubaix : Alexandria Ocasio-Cortez. Née trois semaines avant la chute du mur de Berlin, elle est devenue, à 29 ans, la plus jeune députée de l’histoire du Congrès des États-Unis. Pour elle, comme pour cette génération en général, la guerre froide, c’est du passé. En revanche, elle a subi de plein fouet le 11 septembre 2001 et surtout la grande crise financière de 2008.

Elle incarne une génération beaucoup plus progressiste que les générations précédentes. À travers elle, on voit tout ce qui a changé dans la politique américaine depuis au moins une dizaine d’années. Il y a dix ans, il était totalement inenvisageable qu’une jeune femme d’origine portoricaine se décrivant comme socialiste démocratique soit élue au Congrès des États-Unis.

Dans votre livre, vous détaillez les parcours de dix personnalités appartenant à cette génération des millennials. Plusieurs d’entre elles ont des origines caribéennes ou latino-américaines.

En effet. Pourtant, je n’ai pas choisi ces dix personnes en fonction de leur origine mais pour ce qu’elles représentaient dans la société. Les millennials sont la génération la plus diverse de l’histoire des États-Unis. C’est aussi la génération la plus diplômée et la plus nombreuse. Avec 75 millions d’individus, elle dépasse en nombre les baby-boomers. Les millennials ont un rapport particulier à l’identité : ils ne veulent pas qu’on les réduise à leur origine ethnique.

« Les millennials ne sont pas seulement un phénomène politique et électoral. »

Qu’est-ce qui vous fait penser que cette génération composée de journalistes, d’humoristes, d’avocats, de sportifs ou de cuisiniers pourrait renverser la table ?

En présentant une large palette de profils et de trajectoires, j’ai voulu montrer que les millennials n’étaient pas seulement un phénomène politique et électoral. Je décris le parcours du chef cuisinier Fabian von Hauske (d’origine mexicaine) qui, avec un ami, a développé une cuisine simple, en circuits courts aux antipodes de la malbouffe. C’est aussi un acte et un phénomène politiques.

Quel impact les millennials ont-ils sur la politique américaine ?

Mon livre analyse les processus électoraux en essayant de répondre à cette question : en quoi l’arrivée de cette génération à la maturité politique peut-elle changer la donne ? En 2008 déjà, Obama a été élu par une proportion de jeunes jamais observée depuis les années 1960. Huit ans plus tard, sans les millennials, on n’aurait pas assisté à l’émergence de Bernie Sanders.

« Des deux côtés de l’Atlantique, cette jeunesse fait la même expérience historique et sociale : elle pense qu’elle vivra plus mal que la génération de ses parents. »

En quoi cet avènement des millennials nous concerne-t-il, en France ?

La France et les États-Unis possèdent des points communs : ce sont deux grandes puissances nées de la révolution industrielle, avec une jeunesse qui présente une grande diversité et qui change notre regard sur les questions identitaires. Des deux côtés de l’Atlantique, cette jeunesse fait la même expérience historique et sociale : elle pense qu’elle vivra plus mal que la génération de ses parents. Elle aide aussi la société à prendre conscience de la gravité du réchauffement climatique et des problématiques environnementales.

Parmi les jeunes qui changent l’Amérique, vous citez la rappeuse Cardi B, classée par le magazine « Time » parmi les 100 personnes les plus influentes du monde…

Son histoire est très intéressante. Elle est à contre-courant du rap des années 1990-2000 qui faisait l’apologie de l’argent. En 2003, le rappeur « 50 Cent » chantait par exemple « Deviens riche ou meurs en essayant de le devenir ». Avec Cardi B, quelque chose a changé. Sa musique mêle les lignes de base du rap avec la salsa. Elle aurait pu se contenter de faire du pognon et d’enchaîner les disques d’or. Au lieu de cela, elle est allée très loin dans son engagement politique contre Trump et en faveur de Sanders.

Les États-Unis sont-ils vraiment le modèle de démocratie et de contre-pouvoirs qu’on cite souvent en exemple dans les médias français ?

Comme le dit la romancière Joyce Carol Oates, les États-Unis sont une république, pas une démocratie. Certes, il y a des contre-pouvoirs qui fonctionnent assez bien, mais les institutions américaines ne sont pas par nature démocratiques.

Premier exemple : les Américains n’élisent pas leur président au suffrage universel direct. On peut être élu tout en étant minoritaire en voix, ce qui fut le cas de Trump. Deuxième exemple : la Cour suprême, organe qui, en dernière instance, décide du destin des lois votées par le Congrès. Elle est composée de juges qui ne sont pas élus mais nommés à vie par le président. C’est donc l’organe le plus antidémocratique qui soit.

Les millennials peuvent-ils faire obstacle à la réélection de Donald Trump le 3 novembre prochain ?

Ce sera l’une des clés du scrutin. Comment Joe Biden va réussir à attirer le vote de l’aile gauche démocrate. Or les millennials ont voté à 70 %, voire 80 %, pour Sanders aux primaires démocrates. Pour l’instant, Biden ne les a pas convaincus, même s’il a gagné la primaire.


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