En octobre dernier, le centre de vacances de Saint-Cyprien a accueilli un stage de transmission et de passation de chiens d’assistance avec les personnes en situation de handicap qu’ils accompagneront dans la vie quotidienne. Dispensé par l’association Handi’chiens, ce stage s’est déroulé en partenariat avec la CCAS et la CMCAS Aude-Pyrénées Orientales.
Mistral, un superbe labrador noir de 2 ans, sera désormais le compagnon de route de Guillaume, 12 ans, qui souffre d’une myopathie de Duchenne, maladie neuromusculaire dégénérative. Mistral n’est pas un toutou ordinaire mais un animal d’assistance qui, dans sa vie de tous les jours, accompagnera le petit garçon cloué dans un fauteuil. Guillaume et Mistral sont déjà très complices au bout de quelques jours seulement. « Mistral va m’apporter du bonheur ! On se fera des câlins, confie timidement le gamin. Il va m’aider, m’apporter ou ramasser des objets parce que je ne le peux plus, poursuit–il. J’ai appris que les chiens aiment la musique. Alors, on en écoutera ensemble. »
Guillaume, comme sept autres adultes et enfants handicapés, suit la formation d’une quinzaine de jours organisée par l’association Handi’chiens. Du 14 au 22 octobre dernier, tout ce petit monde a pu être accueilli au centre de vacances de Saint-Cyprien, dans le cadre d’un partenariat de longue date entre l’association Handi’chiens, la CCAS et la CMCAS Aude-Pyrénées Orientales. Au programme, un cursus pratique et théorique durant lequel le futur maître fait connaissance avec son partenaire canin, apprend à le commander, à le gérer grâce à des mises en situation que les personnes seront amenées à vivre une fois rentrées à la maison. Un moment essentiel et intense durant lequel vont se nouer des liens très forts, indéfectibles entre eux.
Un apprentissage adapté au handicap
Pour Julie, la communication avec Manda, sa chienne d’assistance, passe par une synthèse vocale, mais aussi et surtout par le toucher… ©Éric Raz/CCAS
Huit éducatrices canines de Handi’chiens, sous la responsabilité de Jean-Luc Hervieux, éducateur référent, ont chacune en charge le suivi d’une personne handicapée et du chien qui lui est attribué. « Durant le stage, il faut faire naître une attache entre la personne et son chien, explique Gladys, éducatrice canine. Il a reçu un dressage de base, commun à tous les chiots, avec une vingtaine de commandes auxquelles il sait répondre. Ensuite, et c’est l’intérêt du stage, nous adaptons l’apprentissage à la spécificité du handicap de la personne. »
Gladys encadre Manda, une golden retriever presque blanche, « chien d’éveil » qui sera remise à Julie, 32 ans. Polyhandicapée, la jeune femme ne parle pas mais comprend parfaitement ce qu’on lui dit. C’est par l’intermédiaire d’une synthèse vocale – un mini-ordinateur sur lequel figurent des pictogrammes – que Julie transmet ses ordres à Manda, laquelle les exécute parfaitement. L’éducatrice canine lui apprend à s’allonger sur le lit, tout près de Julie, afin que la jeune femme puisse l’effleurer, la câliner.
« Manda, c’est tout l’or du monde pour Julie. Elle est d’une très grande patience, constate Jean-Luc Hervieux. C’est important que Julie puisse entrer en contact avec sa chienne, la toucher, qu’elle puisse percevoir la douceur du pelage, la chaleur que dégage l’animal. » Lorsque Manda pose délicatement ses deux pattes sur les épaules de sa maîtresse, Julie est aux anges. La rencontre entre ces deux-là a visiblement fonctionné ; la communion est déjà bien établie. « Manda, c’est un cadeau pour Julie, considère Isabelle, sa maman. Je lui ai expliqué qu’elle devrait la sortir chaque jour. Ça va changer beaucoup de choses : elle aura une relation forte, bien à elle, avec sa compagne à quatre pattes qui, en plus, lui apportera une ouverture sur le monde et l’obligera à aller vers l’extérieur. »
Apprendre à gérer son chien
Après un rappel de leurs droits et devoirs, les bénéficiaires de Handi’chiens s’attaquent aux exercices pratiques. ©Éric Raz/CCAS
La matinée est consacrée à une série d’exercices dans le centre de vacances. Un petit parcours a été aménagé que chaque binôme doit emprunter. « Normalement, on n’a rien à vous dire. Vous connaissez les exercices », prévient Cinthia, l’éducatrice canine. L’entraînement est vécu comme un jeu pour les canidés, toujours contents de bien faire. Sous l’œil attentif de leur encadrant, le maître formule la commande qui doit toujours être précédée du nom de l’animal.
Muriel, 53 ans, tétraplégique à la suite d’un accident de moto, s’y colle avec Moon, sa golden retriever. « Moon, couchée, apporte, va chercher, aboie (pour prévenir d’un danger)… Moon, up ! (la chienne monte ou pose ses pattes antérieures sur quelque chose pour y prendre ou y déposer un objet, chez un commerçant par exemple) ». Le binôme Moon-Muriel a bien réussi l’exercice. « J’ai une chienne exceptionnelle ! Je l’aime déjà ! Je suis contente, je la maîtrise bien », s’en amuse Muriel, sans oublier de féliciter sa partenaire. « Avec Moon, je ne serai plus toute seule, même si j’ai des amis. C’est une compagnie, de l’amour aussi. Une sécurité même si ce n’est pas un chien de garde », ajoute-t-elle.
En conditions réelles à Argelès-sur-Mer. À gauche : Guillaume et Mistral, suivis d’Enora et Mali. À droite : Muriel demande un « up » à Moon, qui s’exécute immédiatement. ©Éric Raz/CCAS
Une sortie à Argelès-sur-Mer est organisée l’après-midi. En ville, les sollicitations et autres distractions ne manquent pas pour nos amies les bêtes. Un test grandeur nature pour apprendre à faire face à toutes sortes de situations et à gérer les imprévus. Là encore, l’équipe des éducateurs canins, très pro, observe le moindre détail et ne laisse rien passer. « Nous sommes là pour évaluer le niveau de compétences des bénéficiaires, corriger les erreurs, rectifier les manquements », indique Léna. Pour une réussite optimale, les bénéficiaires doivent impérativement « dire la bonne commande avec la bonne intention et bien placer leur fauteuil, pour ne pas empêcher le chien d’exécuter l’ordre », précise Jean-Luc.
« Tu dois accompagner ta chienne. Tu ne dois pas tirer sur sa laisse mais lui parler, lui dire « on y va » pour la faire avancer, conseille Léna à Sabrina. Si elle accélère, tu la fais asseoir. » Sabrina, 38 ans, mère de trois enfants, ex-gendarme, est hémiplégique gauche suite à un accident cérébral. Elle se déplace essentiellement en fauteuil mais peut marcher avec une béquille sur une petite distance. L’alchimie a tout de suite opéré avec Magic, autre magnifique golden retriever. « Magic est très calme et douce. Elle me rassure ; en cas de chute, elle donnera l’alarme. Grâce à elle, j’aurai plus d’autonomie », s’émerveille la jeune femme. « En quelques jours seulement, le lien s’est tissé. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle réponde ainsi à mes attentes. »
L’éducation des chiens d’assistance
Chaque année, Handi’chiens remet gratuitement 150 chiens d’assistance à ses bénéficiaires, enfants, adolescents et adultes. L’association forme des chiens d’assistance proprement dits (pour les personnes en fauteuil), d’éveil (enfants polyhandicapés, autistes ou atteints de trisomie 21), et d’accompagnement social (par exemple pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer), en fonction des besoins des bénéficiaires. Un chien coûte 15 000 euros.
Le chiot (labrador ou golden retriever essentiellement) est placé dans une famille d’accueil qui le sociabilise durant seize mois. À 18 mois, le chien suit un apprentissage dans l’un des quatre centres de Handi’chiens pendant six mois.
Une première rencontre est organisée avec un potentiel futur maître. Le choix est déterminé en fonction du caractère du chien et du profil de la personne handicapée, de son environnement (maison, appartement, présence d’autres animaux…). À l’issue d’un stage de transmission et de passation de deux semaines, le chien est officiellement remis à son bénéficiaire.
L’animal pour restaurer la confiance en soi
Séance photo avec Frédéric Coignot, photographe et famille d’accueil bénévole pour l’association Handi’chiens. À droite, Emmanuelle Beck-Rigola, fille d’agent et première bénéficiaire à avoir reçu un chien d’assistance en 2016. ©Éric Raz/CCAS
Azzedine, 9 ans, en vacances à Saint-Cyprien avec ses grands-parents, est intrigué par la présence des chiens dans le centre. Conscient que les toutous ont pour fonction d’assister les personnes handicapées, il s’approche timidement d’eux. Puis peu à peu, il ose aborder Guillaume, et même questionner Muriel sur les raisons de son handicap. La glace est rompue. L’animal d’assistance est un réel vecteur de communication et d’intégration. Il participe à abattre les barrières, à modifier le regard des valides sur le handicap et favorise l’approche des uns envers les autres.
Si le toutou apporte confort, secours et sécurité à la personne handicapée, il contribue également à restaurer une confiance en soi malmenée. Le compagnon à quatre pattes devient un vrai partenaire de vie, sur lequel la personne handicapée concentre sa sollicitude et se détache de ses propres maux. Une « canothérapie » en quelque sorte. « La personne ne se sent plus victime ; elle est responsable de l’animal. Plus autonome, elle se sent moins dans l’assistanat. En portant son attention sur son compagnon, la personne handicapée s’oublie un peu et se focalise moins sur ses douleurs, confirme Jean-Luc Hervieux. C’est une belle école de la vie. »
« Nous partageons des valeurs communes »
Deux questions à Mickaël Gros, responsable du centre de formation Handi’chiens de Lyon
Quel est l’intérêt d’un partenariat avec la CCAS ?
Nous éprouvons des difficultés pour trouver des sites capables de nous accueillir – un groupe conséquent –, dans de bonnes conditions et à des prix raisonnables. Pour le stage de transmission et de passation de chiens d’assistance, nous avons besoin de 10 à 14 chambres adaptées aux personnes handicapées, des espaces pour réaliser les exercices avec les chiens et une salle accessible aux handicapés pour la partie théorique. Sans compter la restauration. Le centre CCAS de Saint-Cyprien, idéalement situé, répond à toutes nos exigences, avec un rapport qualité-prix très satisfaisant. Les bungalows sont propres, confortables et bien agencés pour le handicap : c’est assez exceptionnel.
Connaissiez-vous la CCAS auparavant ?
Non. C’est par l’intermédiaire de Francis Gatelau, agent retraité, bénévole dans notre association que nous avons découvert la CCAS. Nous étions attendus, avons été très bien accueillis et même chouchoutés. Tout a été parfaitement organisé. Concernant la restauration, nos bénéficiaires suivent des régimes alimentaires spécifiques. La CCAS a été en mesure de proposer une cuisine répondant à ces critères. C’est assez exceptionnel. De plus, nous avons découvert que nous partageons des valeurs communes : la solidarité, la dignité, la justice. D’ailleurs, nos bénéficiaires, en découvrant le bracelet d’entrée [chaque personne doit en porter un à l’intérieur du centre de vacances, ndlr] sur lequel sont inscrits les mots « Justice, dignité, solidarité », ont pensé que ce bracelet avait été créé spécialement pour Handi’chiens. Avoir un partenaire comme la CCAS revêt beaucoup de sens pour notre association. J’espère que ce partenariat pourra être renouvelé.
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Si vous souhaitez soutenir Handi’chiens :
Par courrier (chèque) : Handi’chiens, 13 rue de l’Abbé-Groult, 75015 Paris.
Ou en ligne sur le site Internet de l’association.
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Site Internet : www.handichiens.org
Tags: À la une Association CMCAS Aude Pyrénées-Orientales Handicap Partenariat
bonjour,
j’ai un handicap reconnu, je marche avec une canne.
depuis 3 mois j’ai commencé l’éducation de mon chien dans la rue. il n’a que 1 an, mais il reconnait déjà les ordres principaux pendant les promenades, je lui ai appris à traverser sur les passages piétons et sur ordre.
le problème, c’est que je fais tout ça sans laisse physique, hors je viens d’apprendre qu’il existe un arrêté municipal obligeant la laisse. je souhaite que mon chien reste libre et commandé à la voix. ma question est de savoir s’il existe une exception à la réglementation. une 2ème question : une laisse électronique sans fil peut-elle être assimilé à une laisse physique.
bien cordialement.
Bonjour,
En effet, le fait de tenir en laisse son chien n’est obligatoire que si un arrêté municipal ou le règlement sanitaire départemental le prévoit (voir sur service-public.fr).
Cependant la réponse à vos deux questions nécessitent un·e spécialiste !
Plusieurs associations peuvent vous orienter (sous réserve de la disponibilité de leur équipe aux contacts habituels en raison du confinement) :
– l’association Handichiens (voir les contacts au siège et en région ici)
– la fédération des associations des chiens guide d’aveugle (plusieurs associations sur tout le territoire, vous pouvez voir les contacts ici)
– la confédération nationale des organisations de chiens d’aide à la personne (voir les contacts)
Espérant que vous trouverez une réponse,
Bien cordialement,
La rédaction
Bonjour,
Je suis pensionnée (anticipée 58 ans) et je souhaitais vivement rejoindre les accompagnateurs dans les séjours pluriels. Quelles sont les conditions pour intégrer le groupe, une fois que ma CMCAS d’appartenance a validé ma demande ? Je suppose qu’il y a des formations spécifiques. Merci pour votre réponse.
Bonjour,
Merci pour votre intérêt et votre engagement.
Nous reviendrons vers vous au plus vite avec les éléments.
Bien cordialement,
La rédaction
Bonjour,
Concernant le convoyage des séjours Pluriel, il n’existe pas de formation spécifique car la règle de ce dispositif est que l’accompagnement se fasse par la famille, afin qu’elle puisse échanger avec l’équipe du centre de vacances sur les habitudes de vie quotidienne du bénéficiaire.
Dans le cas exceptionnel où les familles ne peuvent accompagner leurs proches, le convoyage peut être pris en charge par les CMCAS au travers du réseau solidaire.
Pour les jeunes en situation de handicap qui souhaitent partir avec le convoyage collectif, la direction santé de la CCAS donne son accord au regard de la pathologie et ensuite l’enfant peut participer au convoi collectif, qui pourra être renforcé si nécessaire.
Par ailleurs, votre CMCAS sera en capacité de vous informer plus amplement sur toutes les formes que peut prendre votre engagement auprès des bénéficiaires en situation de handicap et des bénéficiaires isolé·es socialement (au travers du réseau de lien social et solidaire), y compris en proximité dans toutes les activités proposées.
N’hésitez donc pas à la contacter !
Espérant avoir répondu à votre demande,
Bien cordialement,
La rédaction