Séisme au Maroc : reportage aux côtés d’Électriciens sans frontières

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La région montagneuse du Haut Atlas fait partie des lieux les plus touchés par le séisme qui a secoué le Maroc le 8 septembre dernier. Photo : Youssef, 14 ans, et sa famille ont trouvé refuge dans l’une des 54 tentes installées à l’entrée du village de Tizi N’Oucheg, au sud-est de Marrakech. ©François Puthod/CCAS

Après le séisme du 8 septembre, qui a causé la mort de près de 3 000 personnes et dévasté près de 50 000 habitations, Électriciens sans frontières, partenaire des Activités Sociales, a dépêché deux bénévoles au Maroc pour équiper en éclairage solaire les tentes des sinistrés.

Le contexte

  • Vendredi 8 septembre 2023, un séisme de magnitude 7 – le plus puissant jamais enregistré au Maroc – secoue le Royaume chérifien en pleine nuit, causant près de 3 000 morts et 5 000 blessés. L’épicentre se situe dans la région d’Ighil, à 200 km au sud de Marrakech, dans une région montagneuse abritant de nombreux douars (villages) isolés et difficiles d’accès.
  • Hervé Gouyet, président d’Électriciens sans frontières (ESF), envisage les modalités d’une intervention d’urgence avec Ahlam Ennouhi, ingénieure et vice-présidente de l’association partenaire Morocco Energy Leaders, qui regroupe de jeunes cadres marocains du secteur de l’énergie.
  • Par chance, 644 kits solaires d’éclairage de l’entreprise Sicame, initialement destinés à l’Ukraine, sont entreposés dans le port de Tanger Med. Décision est prise par ESF en accord avec le fabricant de sortir ce matériel de la zone franche et de le rediriger vers le Haut Atlas. Objectif : équiper les tentes fournies par les autorités et sous lesquelles se sont réfugiées les populations.
  • En parallèle de son appel aux dons, ESF lance un appel à volontaires pour se rendre sur zone. Le 13 septembre, cinq jours seulement après la catastrophe, Éric Dupas et Serge Fernandez, retraités des IEG et bénévoles d’ESF, s’envolent vers Marrakech pour deux semaines de mission, se répartissant le travail dans les trois provinces les plus touchées par le séisme : Taroudant, Al Haouz et Chichaoua.

« Vu la disposition du campement, je pense qu’on peut mettre un panneau solaire pour deux ou trois tentes au maximum. » À peine arrivé à Tizi N’Oucheg, village berbère perché à 1 600 m d’altitude et situé à une heure trente de route au sud-est de Marrakech, Éric Dupas est à pied d’œuvre. Sa mission du jour : éclairer une cinquantaine de tentes, installées après le séisme, à l’entrée du douar, pour mettre à l’abri les 500 habitants. Histoire qu’ils puissent dormir tranquille… Car, si le tremblement de terre n’a fait ici aucune victime, désormais plus personne n’a envie de passer la nuit dans sa maison, fissurée de toutes parts.

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Dans la vallée de l’Ourika, la vie sous les tentes s’organise. En attendant de pouvoir tout reconstruire. ©François Puthod/CCAS

Bénévole d’Électriciens sans frontières (ESF) depuis dix-huit ans, Éric Dupas attaque son huitième jour dans le massif du Haut Atlas. Ancien d’Enedis, délégué régional ESF Normandie, ce jeune retraité de 62 ans a débarqué à Marrakech le 13 septembre, accompagné de son binôme et « classard » nîmois, Serge Fernandez. « Avec les bénévoles de notre partenaire local, Morocco Future Energy Leaders (MFEL), nous nous sommes répartis en trois équipes pour installer 644 kits d’éclairage solaire en moins de dix jours dans les provinces les plus touchées par le séisme, explique Éric, qui vient au Maroc pour la première fois.

« Serge est parti à Taroudant et Noureddine, un ingénieur marocain que nous avons briefé avant qu’il parte, à Chichaoua. Moi, je m’occupe de la région d’Al Haouz, au sud de Marrakech. Il a fallu trouver des camions, charger le matériel, puis définir, en lien avec les autorités, les lieux de nos interventions quotidiennes en fonction des besoins. » Et ils sont immenses, compte tenu des dégâts visibles à des dizaines de kilomètres à la ronde.

« Nous avons eu de la chance ici, tempère Rachid, propriétaire du gîte de Tizi N’Oucheg et responsable de l’association du village. Trois ou quatre maisons seulement se sont écroulées. Sans doute parce que notre sol est plus dur qu’ailleurs. Dans d’autres régions, au terrain plus meuble, les éboulis détachés des flancs rocheux ont finalement fait plus de dégâts que le séisme lui-même. »

644 kits d’éclairage solaire installés en moins de 10 jours 

Septembre 2023 : 644 kits solaires distribués et installés dans 3 provinces marocaines par les bénévoles d’Électriciens sans frontières. Par Tiffany Princep via canva.com

En attendant de tout reconstruire dans les règles de l’art, comme l’a ordonné le roi Mohammed VI, l’installation d’un kit d’éclairage solaire suffit à changer la vie. Notamment celle de Youssef, 14 ans, dont la famille a trouvé refuge dans l’une des tentes fournies par la commune d’Ourika, en contrebas de Tizi N’Oucheg, tentes que les habitants du douar ont montées eux-mêmes.

 « Ce n’est plus possible de vivre à la maison, on a peur que tout s’écroule ».
Mohammed, 19 ans, habitant de Tizi N’Oucheg

En pratique, monter un kit d’éclairage solaire est un vrai jeu d’enfant. À la portée de n’importe quel môme de 5 ans. L’équipement se compose d’un panneau solaire de 25 W ou 40 W, d’une station de recharge de 140 W ou 280 W, alimentée par une batterie au lithium comprenant 2 ports USB et 4 ports 12 V, et de deux lampes LED 3 W avec 5 m de fil. On peut même y ajouter une ou deux « triplettes », soit trois ampoules LED de 3 W reliées à 10 m de câble.

À l’image de Mohammed, tout le monde donne un coup de main pour installer les kits solaires, sous les conseils d’Éric Dupas, bénévole à Électriciens sans frontières depuis 2005. ©François Puthod/CCAS

Largement de quoi éclairer l’intérieur des tentes, d’une surface de 12 m2 chacune. « Il faut juste veiller à deux choses : bien exposer le panneau, au sud évidemment, et éviter les points d’ombre. Si tu caches une cellule, ton panneau ne marche pas », prévient Éric, en expert. Dernière précaution d’usage : penser à éteindre les ampoules quand on n’en a pas besoin, pour éviter de décharger la batterie inutilement. Le raccordement s’effectue en deux temps, trois mouvements.

Le plus dur, finalement, est de poser le panneau sur le toit de la tente, en le maintenant dans la bonne position. Et, comme souvent au Maroc, c’est le système D qui prévaut : un bout de ficelle et une longue tige de bois mort, plus ou moins rectiligne, feront l’affaire !

« Ça a beaucoup tremblé, ici. Bezef ! Mais hamdoulilah (dieu soit loué), il n’y a pas eu de mort. La première nuit sous la tente, j’ai super bien dormi ! En plus maintenant, on va avoir la lumière le soir et pouvoir recharger nos téléphones portables !  »
Youssef, 14 ans, habitant de Tizi N’Oucheg

En moins de cinq heures, pause tajine comprise, les 32 kits d’éclairage solaire qu’Éric était prévu d’installer sont en place. « Tout le monde a donné un coup de main. C’est une journée bien remplie et on finit de bonne heure », se réjouit le bénévole, heureux de pouvoir pour une fois rentrer à son camp de base avant la nuit. Il aura tout le temps, ce soir, de « débriefer » au téléphone avec son collègue Serge sur le déroulement de leurs journées respectives.

Sous la tente, Mohammed, 21 ans, procède aux derniers raccordements. Pour Éric et Amine, étudiant en école d’ingénieurs, mission accomplie ! Et qu’importe la technique de pose du panneau solaire, pourvu qu’il éclaire ! ©François Puthod/CCAS

« Je suis impressionné par la solidarité des Marocains  » 

Que retiendra Éric de sa dernière expérience, lui qui est déjà intervenu en urgence pour le compte d’ESF à Haïti, aux Philippines ou encore au Vanuatu ? « Je suis impressionné par la solidarité des Marocains et leur organisation dans la gestion de cette catastrophe. Cette mission, très bien coordonnée, est un vrai succès. »

« Vous n’avez peut-être pas gagné la Coupe du monde, mais vous êtes champions du monde ! »
L’hommage en forme de clin d’oeil d’Éric Dupas aux bénévoles de Morocco Energy Leaders, investis à 200 % dans l’aide d’urgence apportée par Électriciens sans frontières.

La capacité de résilience des Marocains, toutes générations confondues, est cruciale pour surmonter cette épreuve. ©François Puthod/CCAS

« Le mérite en revient aux bénévoles et amis de Morocco Future Energy Leaders, insiste Éric. À commencer par Nezha, professeure d’université, et Adil, ingénieur marocain vivant en France, qui ont fait fonctionner leurs réseaux à merveille, mais aussi Amine, étudiant en école d’ingénieurs. Sans oublier Azedine, notre chauffeur, qui peut maintenant monter un kit d’éclairage solaire les yeux fermés ! Là, j’étais au travail… mais je reviendrai certainement pour faire du tourisme. » Sans doute la meilleure manière d’éviter au peuple marocain la double peine.


Urgence séisme Maroc : aider les Marocains avec le Secours populaire

Bannière Urgence séisme Maroc Secours populaire françaisDans leur communiqué du 12 septembre, les présidents des organismes des Activités Sociales rappellent que « pour les Activités Sociales, la solidarité n’a pas de frontières et elle s’exprime envers tous les peuples fragilisés, en souffrance ou affrontant des situations d’urgence. »

Lire le communiqué des présidents

C’est pourquoi ils invitent les agents des Industries électriques et gazières à donner au Secours populaire français, dont la campagne « Urgence séisme Maroc » a besoin de toutes les solidarités.

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