À Mayotte, « il n’y a même plus d’eau pour les enfants » témoigne le président de la CMCAS

Belhadje Cheik Ahamed, président de la CMCAS Mayotte

Travaillant lui-même dans des conditions difficiles, Belhadje Cheik Ahamed, président de la CMCAS Mayotte, sillonne l’île avec ses collègues pour recenser les besoins des bénéficiaires suite au passage du cyclone Chido en décembre dernier. ©Julien Millet/CCAS

Un mois après le passage du cyclone Chido, la pénurie d’eau, de nourriture et d’électricité rend la vie très difficile à Mayotte. Le président de la CMCAS Mayotte, Belhadje Cheik Ahamed, continue de sillonner l’archipel pour identifier les besoins de ses 1 300 bénéficiaires.

En bref

  • Un cyclone tropical dévastateur. Le cyclone Chido a touché Mayotte le 14 décembre 2024, dévastant plus de 90 % de l’île. Avec des rafales à plus de 220 km/h, le cyclone a causé de nombreux morts et des dégâts matériels colossaux.
  • Un fond d’urgence du Secours populaire français. Dès le 14 décembre, les Activités Sociales ont appelé leurs bénéficiaires à donner au fonds d’urgence du Secours populaire, fonds qui a déjà permis d’apporter 100 000 euros d’aide aux Mahorais.
  • Une loi d’urgence votée à l’Assemblée. Le 22 janvier, l’Assemblée nationale a voté la loi d’urgence pour la reconstruction de Mayotte qui prévoit plusieurs mesures pour « faciliter et accélérer » la reconstruction des infrastructures mahoraises.
  • Les agents EDF et Enedis en appui à Électricité de Mayotte. Selon EDF, plusieurs dizaines d’agents EDF et Enedis, notamment les agents de la Force d’intervention rapide d’électricité (Fire), se relaient sur place pour rétablir le courant.
  • Une coordination nationale des aides des Activités Sociales en cours. Une rencontre entre le président de la CMCAS Mayotte et le Comité de Coordination des CMCAS est prévue le 4 février au siège de la CCAS, à Montreuil. Objectif : trouver des solutions concrètes. Les cinq CMCAS d’Occitanie organisent déjà en ce moment l’envoi d’un container solidaire de première urgence.

Un mois après le cyclone Chido, comment vont les bénéficiaires de la CMCAS Mayotte ?

Les cœurs sont touchés. Il n’y a que la tête qui tient. C’est compliqué : nous n’avons pas les fonds nécessaires pour venir en aide aux bénéficiaires.

Y a-t-il des victimes, des blessés parmi les bénéficiaires ?

À ma connaissance, non. Mais cinq familles n’ont plus de maison. D’autres ont quitté le territoire après la destruction de leur maison et ne sont pas encore rentrées. Beaucoup de maisons sont endommagées, beaucoup de familles ont perdu leur toit. On essaye de les rafistoler comme on peut.

Nous n’avons pas terminé de faire le tour des bénéficiaires. Nous continuons à recenser leurs besoins. Nous avons identifié trois catégories de sinistres, trois cas de figures : dans le premier cas, la maison est inhabitable ; dans le deuxième cas, elle a subi des dégâts mais elle est habitable ; dans le troisième cas, les dégâts concernent uniquement les portes, les fenêtres ou les meubles.

« Ce qui ralentit le travail de recensement, c’est le deuxième cyclone, Dikeledi, qui a amené énormément de pluies et a causé des glissements de terrain et des inondations. »

Qui est chargé d’aller à la rencontre des bénéficiaires pour identifier les besoins ?

Nous sommes deux à la CMCAS : le technicien accueil-conseil et moi-même. Nous passons chez les gens pour recenser leurs besoins. Dans les zones difficiles d’accès, je demande à d’autres élus de prendre le relai. Depuis un mois, on ne fait que ça, on ne peut rien faire d’autre.

Ce qui ralentit le travail de recensement, c’est le deuxième cyclone, Dikeledi, qui a amené énormément de pluies et a causé des glissements de terrain et des inondations. Des routes ont été coupées en deux.

Dégâts causés par le cyclone Chido à Mayotte, décembre 2024.

Département français le plus pauvre, Mayotte a subi en quelques semaines un cyclone tropical et de fortes pluies, compliquant le travail des secours. ©Handout/Sécurité civile/AFP

Qu’en est-il des locaux de la CMCAS ?

Ils sont situés dans le bâtiment d’Électricité de Mayotte (EDM), à Mamoudzou, mais ils ont aussi souffert. Dans mon bureau par exemple, la fenêtre a cédé, le faux plafond s’effondre et il n’y a plus de climatisation, il est donc difficile de travailler.

Quelles sont les principales attentes des bénéficiaires ?

Ils ont besoin d’aide pour reconstruire leur maison. 90% de la population mahoraise n’est pas assurée. On n’avait jamais subi une telle catastrophe, donc l’assurance habitation n’a jamais été une priorité.

Mais il y a un autre souci : la logistique et le manque de professionnels et de matériel. Ceux qui avaient une assurance ne sont pas mieux lotis : les assureurs sont tellement débordés qu’il est quasiment impossible de trouver un expert. Il y a trop de cas à gérer !

Avez-vous besoin d’eau potable ?

Clairement. Les magasins sont vidés ! Il n’y a même plus d’eau pour les enfants ou les nourrissons. Le pack de six bouteilles à Mayotte est à 8 euros alors qu’il est autour d’1 euro à Paris. Si on pouvait acheminer un container de packs d’eau depuis La Réunion pour les distribuer à nos bénéficiaires…

« Travailler à EDM et ne pas avoir d’électricité, mentalement c’est très compliqué. »

Quid de l’accès à l’électricité ?

Depuis le cyclone il y a un mois, il y a des bénéficiaires qui sont toujours dans le noir. Ils ont dû jeter tout ce qu’il y avait dans leurs frigos et congélateurs. J’ai moi-même passé dix jours sans électricité, donc sans climatisation. Or il fait extrêmement chaud (38°C aujourd’hui).

Travailler à EDM et ne pas avoir d’électricité, mentalement c’est très compliqué. Les collègues assurent un travail remarquable sur le terrain pour rétablir le courant mais malgré cela, certains Mahorais ne sont pas près d’avoir de nouveau de l’électricité chez eux.

Plusieurs CMCAS de l’Hexagone s’organisent pour vous venir en aide. Cela vous met-il du baume au cœur ?

Oui, bien sûr. Je sais par exemple que les CMCAS de la région Occitanie ont fait des appels aux dons auprès de leurs bénéficiaires. Elles vont envoyer un container de matériel et de vivres. Il y a de plus en plus de présidents de CMCAS qui m’appellent. Ça fait du bien, on se sent moins seul.

Nous avons un rendez-vous le 4 février à Montreuil avec le président du Comité de Coordination des CMCAS pour voir comment nous pouvons être accompagnés dans la reconstruction. Mais pour le moment, on ne peut rien faire de vraiment concret pour nos bénéficiaires.

Que peuvent faire les bénéficiaires de l’Hexagone pour vous venir en aide ?

Il faut qu’ils se rapprochent de leur CMCAS. L’idée serait d’envoyer des containers avec des produits alimentaires adaptés : des sacs de pommes de terre par exemple, mais aussi de l’eau, ce genre de choses.

En plus, le ramadan arrive, le 28 février, et ici, 90 % de la population fait le ramadan. Or, on n’a pas de quoi manger, et donc rien pour la rupture du jeûne. Avec le cyclone, toute l’agriculture est dévastée : les bananiers, les cocotiers ont été fauchés. À Mayotte, on mange traditionnellement du manioc, des bananes, des songes (tubercules)… On va être obligés de manger des produits importés que certains n’ont pas l’habitude de manger.


Fonds d’urgence Mayotte

Le Secours populaire français (SPF) lance un appel aux dons financiers et à la mobilisation de tous, auquel s’associent les Activités Sociales, pour venir en aide aux populations touchées par le cyclone Chido à Mayotte. Une aide financière de 100 000 euros a déjà été débloquée et le SPF travaille avec ses partenaires mahorais afin d’apporter un soutien d’urgence aux sinistrés, qui s’inscrira dans la durée.

► Donnez via la Fédération nationale des électriciens et gaziers du SPF
Lors de votre don en ligne au fonds d’urgence Mayotte, affectez votre don à la Fédération nationale des électriciens et gaziers du SPF, en sélectionnant la Fédération lors du choix de votre département, tout en bas de la liste déroulante.

Aidez Mayotte en donnant au fonds d’urgence du SPF 

Vous pouvez donner par chèque à l’association à l’adresse suivante :
Fédération nationale des électriciens et gaziers du SPF
40, rue Gaston-Lauriau
93100 Montreuil
Site Internet : secourspopulaire.fr/fneg
Téléphone : 09 52 47 85 29

Votre don ouvre droit à une réduction d’impôts égale à 75 % du montant de votre versement. Profitez-en pour être encore plus solidaire !

Le Secours populaire est une association agréée par le Comité de la Charte du don en confiance.

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