Sélection polar : Syrie, aller sans retour

Sélection polar : Syrie, aller sans retour | Journal des Activités Sociales de l'énergie | 45829 Pierre Pouchairet Ecrivain

Pierre Pouchairet, auteur de « Tuez les tous… mais pas ici » (Plon, 2018), qui fait partie de la dotation lecture de la CCAS. ©Charles Crié/ CCAS

« Tuez-les tous… mais pas ici » aborde, façon polar, la dévastation de parents brisés et démunis face à la radicalisation islamiste de leurs ados. Un livre de Pierre Pouchairet, ancien commandant de police habitué des missions périlleuses à l’étranger, à rencontrer cet été dans vos centres de vacances.


L’histoire. Martine et Louis Loubriac remuent ciel et terre pour retrouver Julie, leur fille de 17 ans, qui s’est volatilisée depuis plusieurs semaines. Elle a rejoint Yacine, son amoureux, parti faire le djihad en Syrie. Assisté de son ex-femme, Louis, l’ancien flic, décide de mener l’enquête, afin de remonter les filières organisant le départ des jeunes fanatiques depuis la France, qui le mèneront, pense-t-il, à sa fille. Prêt à tout, le couple effectue un tumultueux périple jusqu’en Turquie et à la frontière syrienne, dont il ne ressortira pas indemne.

Bio express. Ancien commandant de police, Pierre Pouchairet se consacre depuis sa retraite à l’écriture de polars. Primé plusieurs fois, il a notamment été lauréat en 2017 du prestigieux prix du Quai des Orfèvres pour « Mortels trafics ». Son prochain ouvrage, « La Bigoudène assassinée », éd. Palémon, sortira fin mai.

Qui êtes-vous, Pierre Pouchairet ?

J’ai débuté comme inspecteur de police en région parisienne. Je suis devenu commandant à la police criminelle, puis j’ai été muté à Nice aux stups pendant douze ans. Ensuite, je suis parti à l’étranger pour des missions de trois ans : au Liban, en Turquie, en Afghanistan et en Cisjordanie. Lorsque j’ai pris ma retraite, j’ai écrit un premier livre témoignage « Des flics français à Kaboul ». J’ai pris goût à l’écriture. Mais écrire ma vie, mon œuvre d’ancien flic, ce n’est pas mon truc. J’ai préféré la fiction qui permet une parole plus libre.

« Je me suis inspiré d’un exemple concret. Celui du fils d’une amie parti, à 18 ans, faire le djihad en Syrie. »

Vous évoquez la quête désespérée de parents qui tentent l’impossible pour récupérer leur fille partie en Syrie rejoindre son petit ami…

Je me suis inspiré d’un exemple concret. Celui du fils d’une amie parti, à 18 ans, faire le djihad en Syrie. Comme le couple Loubriac, elle n’avait rien vu venir. Elle est restée des mois sans nouvelles. Lorsque son fils l’a contactée par Skype, c’était pour lui annoncer qu’il allait « gagner son paradis ». Ce qui m’a fasciné, c’est la transformation du couple Loubriac, notamment celle de la mère. Ils n’ont qu’une idée en tête : retrouver leur fille.

Jusqu’à l’irréparable ?

Le couple se trouve dans une situation qui les dépasse totalement. On leur donne des clés pour mieux les manipuler ensuite. Brisés, ils ne pensent plus qu’à se venger. Pour le père, ancien flic, c’est l’enquête de sa vie. À travers elle, il veut prouver qu’il n’est pas aussi nul et raté qu’on le pense.

« Je voulais des personnages en demi-teinte, ni tout noir, ni tout blanc. »

Vos personnages n’ont rien d’héroïque…

Ils sont plutôt dans le gris sombre. Je voulais des personnages en demi-teinte, ni tout noir, ni tout blanc. Il était important pour moi que les lecteurs puissent être en empathie avec eux et même avoir des affinités avec eux, y compris avec les plus monstrueux. En choisissant une filière d’embrigadement à Quimper, j’ai voulu insister sur ce phénomène de radicalisation qui touche aussi les villes de province.

Des parents sont-ils réellement partis à la recherche de leurs enfants ? Quelle est leur marge de manœuvre ?

Il y a effectivement des parents qui sont partis en Turquie, et même en Syrie, pour tenter de récupérer leur enfant. Mais aujourd’hui, les frontières sont verrouillées.

Dans votre roman, vous montrez comment les autorités françaises facilitent le départ des jeunes candidats au djihad vers la Syrie et manœuvrent pour empêcher leur retour. Pure fiction ou réalité ?

Concernant l’organisation des départs, c’est de la pure fiction. S’agissant des retours, en revanche, la France n’a pas intérêt à voir revenir ses djihadistes, parce qu’ils constituent une menace pour elle. D’ailleurs, l’ancien président de la République Francois Hollande est connu pour avoir « fait éliminer » le plus de combattants djihadistes français à l’étranger (Syrie, Irak…) par la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure) ou par les forces étrangères coalisées (notamment américaines). Je me suis appuyé sur « les Revenants », le livre du journaliste David Thomson. C’est donc une fiction qui pourrait tenir la route.

« Sur place, tout le monde est piégé dans un jeu de dupes. »

S’agissant des départs, les autorités françaises font-elles la différence entre les combattants fanatiques, et les autres, des jeunes femmes surtout, qui rejoignent la Syrie par amour ?

Impossible de faire la différence. Sur place, tout le monde est piégé dans un jeu de dupes. Les jeunes femmes finissent embrigadées.

Vous n’êtes pas tendre avec vos ex-collègues policiers. Vous ne donnez pas non plus une bonne image des politiques, d’ailleurs…

Je ne pense pas être trop loin de la réalité. Mais, en l’occurrence, il s’agit plutôt de hauts fonctionnaires que de politiques. Dans ces sphères, on ne trouve pas choquant d’agir ainsi. Une fois les jeunes fanatisés partis hors de France, personne n’a intérêt à les voir revenir. Pour le bien commun, les victimes collatérales sont inévitables.

« Pour les parents d’un combattant, il est évident qu’il faut les juger en France. »

La France doit-elle, à votre avis, récupérer ses jeunes fanatisés pour les juger sur son territoire ?

C’est une question très compliquée, même avec beaucoup de recul. La réponse dépend probablement du côté où l’on se place. Pour les parents d’un combattant, il est évident qu’il faut les juger en France. Pour le reste, une grande majorité de Français préfère que les djihadistes ne reviennent pas sur le territoire français et qu’ils soient jugés par le pays qui les a emprisonnés.

Le genre policier permet-il d’aborder les sujets d’actualité de façon plus distanciée ?

Le polar a beaucoup changé ; ce n’est plus un meurtre, une enquête. Les polars d’aujourd’hui abordent les faits sociétaux. La police ressemble donc à la société. J’ai voulu me détacher de l’ancien flic pour écrire une vraie fiction. Ce qui est fascinant, c’est que les gens n’aiment pas leur police mais se gavent de séries policières et adorent les polars !


À lire

Sélection polar : Syrie, aller sans retour | Journal des Activités Sociales de l'énergie | Tuez les tous… mais pas ici de Pierre Pouchairet « Tuez-les tous… mais pas ici », de Pierre Pouchairet
Éd. Plon, coll. Sang neuf, 2018, 468 p., 19 euros.

Site internet de l’auteur : pierrepouchairet.com

À lire dans toutes les bibliothèques des centres de vacances de la CCAS.


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