Dans un secteur de l’énergie mondialisé, la coopération des travailleurs, au travers de leurs syndicats et de leurs activités sociales et culturelles, est un enjeu de taille. Pour semer les graines d’une coopération européenne, la CCAS a rencontré le 26 mai les représentants du Comité d’entreprise du Rail (CCGPF), ainsi que ceux des Activités Sociales de l’énergie italienne (Enel), pour un débat organisé dans le cadre du festival Visions Sociales.
En marge de Visions Sociales, le festival de cinéma de la CCAS – qui fêtait ses vingt ans cette année –, avait lieu le 26 mai, au Château des mineurs de La Napoule, une rencontre-débat réunissant plusieurs acteurs du monde de l’énergie. Objectif : s’interroger sur les actions et coopérations culturelles à mener entre les comités d’entreprise (CE) européens de l’énergie. Comment développer de nouvelles activités ? Quelles difficultés de développement risque-t-on de rencontrer ?
Pour y répondre, la CCAS avait convié les représentants de l’Association récréative culturelle et sportive (Arca) du groupe Enel, la société nationale italienne d’électricité, et son vice-président, Renato Parravicini. Claude Pommery, vice-président de la CCAS, et Erwann Dupont, administrateur de la CCAS et président de la Commission internationale, étaient également présents, aux côtés d’Olivier Petit, secrétaire adjoint du Comité central du groupe public ferroviaire (CCGPF), qui représentait le Rail.
De g. à dr. : Olivier Petit, secrétaire adjoint du Comité central du groupe public ferroviaire (CCGPF) ; Claude Pommery, vice-président de la CCAS ; Erwann Dupont, administrateur de la CCAS et président de la Commission internationale ; Renato Parravicini, vice-président de l’Association récréative culturelle et sportive du groupe Enel. ©Eric Raz/CCAS
La CCAS souhaitait, par cette initiative, renforcer l’idée que la culture, le bien-être au travail et la protection du salarié doivent être considérés comme la pierre angulaire des relations entre les CE européens de l’énergie et du rail. Sans occulter le fait que le CE s’occupe historiquement des aspects sociaux de l’entreprise, mais beaucoup moins des conditions de vie des salariés. Une problématique épineuse, alors que deux ans de pandémie ont considérablement modifié nos sociétés. Le système français, qui acte la présence de représentants des salariés au sein des conseils d’administration des entreprises, serait-il également menacé ?
« Ces dernières années ont représenté un tournant, note Renato Parravicini, représentant de l’Arca. Les entreprises ont saisi l’opportunité de faire des économies, tandis que les salariés ont pu accéder à une plus grande flexibilité dans la gestion du travail et à un meilleur équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle. En tant que syndicat, il est primordial de s’occuper de ces sujets […]. Prenons l’exemple d’EDF, qui contrôle la société italienne Edison. Quand Edison s’occupe de « welfare » [bien-être], elle le fait sans impliquer ses travailleurs, bien qu’ils soient présents et représentés au sein du comité social et économique. La société prend des décisions pour ses salariés sans les consulter. Je trouve cela inadmissible. »
Des ripostes syndicales nécessaires
D’après Renato Parravicini, dans le nord-est de l’Italie, c’est près de 66 000 personnes qui auraient démissionné pour accéder à de nouvelles conditions de travail, avec une gestion plus flexible de leur temps. Ce n’est pas (encore ?) le cas en France. Mais Claude Pommery, vice-président de la CCAS, alerte sur le fait que, depuis leur création, la CCAS comme les comités d’entreprise devenus les comités sociaux et économiques (CSE) sont sans cesse attaqués tant dans leurs prérogatives que dans leurs ressources financières. « Cela nécessite des ripostes syndicales, aux côtés des salariés », insiste l’élu de la CCAS. La plupart des grands groupes, et particulièrement dans l’énergie et le rail, ont aujourd’hui une dimension européenne, voire internationale. Alors, comment travailler ces convergences ?
C’est extrêmement important d’apprendre à se connaître, et de découvrir les différents modèles existants. Claude Pommery, vice-président de la CCAS.
« La CCAS entretient des relations bilatérales avec des organisations dans un certain nombre de pays, détaille Claude Pommery. On passe toujours par le réseau syndical, à l’image de la relation entre l’Arca et la CCAS. Notre deuxième outil, ce sont les comités d’entreprise européens, mais qui sont limités en termes de prérogatives. Ils sont un lieu d’information et de rencontre entre organisations syndicales d’un même groupe. C’est extrêmement important d’apprendre à se connaître, et de découvrir les différents modèles existants. » Le troisième levier, c’est le mouvement syndical à travers les fédérations syndicales européennes et internationales « au sein desquelles on peut nouer des relations, tisser des convergences entre organisations ». Avec un mot d’ordre : la culture comme ADN !
Agents des IEG et ambassadeurs culturels : médiateurs amateurs
Vincent Tornil, agent EDF en Haute-Savoie, est ambassadeur culturel au festival Visions Sociales. Son rôle : témoigner de son expérience auprès de ses collègues. ©Eric Raz/CCAS
Le rôle d’ambassadeur a été créé en 2016. L’ambition est de faire découvrir aux jeunes agents de l’entreprise les activités culturelles que propose la CCAS. Les ambassadeurs sont invités aux événements par le président de leur CMCAS. « Nous accueillons des ambassadeurs lors de trois événements nationaux : les Francofolies de La Rochelle, les festivals Contre Courant à Avignon et Visions Sociales à Mandelieu-la-Napoule », détaille Erwann Dupont, administrateur de la CCAS et président de la Commission internationale.
« Notre idée est que les jeunes agents s’imprègnent de l’action culturelle de la CCAS, et nous donnent leur expérience sur le festival en lui-même. Au-delà de ça, il s’agit de faire émerger un attrait pour la vie culturelle au sein de l’entreprise. » Et c’est gagné ! Vincent Tornil, ambassadeur CCAS et agent EDF en Haute-Savoie confie avoir été d’abord sceptique, puis rapidement emballé. « A priori, je ne pensais pas être intéressé par la programmation. J’ai finalement été agréablement surpris par les films que j’ai pu voir. Je ne manquerai pas d’en parler à mes collègues de travail et je les invite à venir découvrir par eux-mêmes ce type d’événement extraordinaire. »
« On a arraché au patronat les activités sociales et culturelles »
« Nous avons une vision émancipatrice des vacances, des loisirs et du travail, témoigne le cheminot Olivier Petit, représentant du CCGPF. Je suis enfant d’agent EDF. Mon attachement à la culture, à ce que sont les vacances, les loisirs, je l’ai vécu à travers la CCAS. Il est important de faire perdurer cette idée de justice sociale. On a arraché au patronat les activités sociales et culturelles. S’il cherche à les récupérer, c’est qu’il y a un intérêt et des objectifs politiques derrière. Il est important de faire perdurer cette idée de justice sociale. »
« Les cheminots sont partenaires de Visions Sociales depuis le début, rappelle Erwann Dupont, élu responsable du festival Visions Sociales, qui préside également la Commission internationale de la CCAS. Mais la CCAS et le CCGPF ne se suffisent pas à eux-mêmes. Nous avons besoin de voir comment cela se passe chez les autres. C’est aussi comme cela, et dans les instances européennes, qu’on pourra aller chercher des financements pour pouvoir faire perdurer les activités sociales inter-entreprises ». Car, comme le rappelle Claude Pommery, les Activités Sociales des salariés reposent sur « une ambition politique sans cesse réaffirmée, sans cesse renouvelée avec un engagement militant très fort », associée à des besoins de financements qu’il faut sans cesse revendiquer et défendre.
Ces rencontres, qui en appellent d’autres, ont trouvé un premier débouché, avec le projet d’un événement sportif réunissant Français, Italiens et Espagnols. Un tournoi qui se tiendrait sur une île très célèbre de la Méditerranée… À suivre !
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