Amiens, place des rois

Open régional d’échec à la CMCAS Picardie (Amiens), dimanche 18 septembre 2016. © J.Marando/CCAS

Pour la deuxième année consécutive, la CMCAS Picardie a accueilli, le 18 septembre dernier, les régionales d’échecs dans ses locaux à Amiens.  

Ficelée à la picarde avec goût et originalité, la régionale d’Amiens a suscité de l’enthousiasme. Et si elle ne fut pas indécise jusqu’au bout…, elle a surtout mis en exergue l’essence même de ces rencontres : un moment d’échanges, de coups certes, mais surtout une communion autour du noble jeu, partie intégrante et intégrée des Activités Sociales de l’énergie.

A l’intérieur de la salle Marcel Paul de la CMCAS Picardie, vingt-cinq participants de tous âges ont ainsi répondu présents dimanche dernier, prêts à en découdre avec les pièces. Dans la salle voisine, l’antre des parties, Daniel Plet, administrateur de la CMCAS, s’active avec minutie à prendre les dernières inscriptions. Mais à l’heure du petit déjeuner, l’enjeu de décrocher une place qualificative pour CapEchecs semble encore bien accessoire. Les poignées de mains, les accolades et les bises échangées entre joueurs et joueuses en attestent.

Pour Michel, c’est une évidence. Ce gazier à la retraite, autrefois classé 1900 Elo [le classement Elo est un système d’évaluation du niveau de capacités relatif d’un joueur en fonction d’un nombre de points, entre 1000 et 3000, NDLR], ne vient jouer « que pour le plaisir et pour l’honneur, rien d’autre ». Café à la main, touillette à la bouche, Michel est visiblement ému de séjourner temporairement dans un lieu dédié à l’ancien ministre de la Production industrielle Marcel Paul. Il écume alors spontanément les souvenirs, à en oublier les prochaines parties : « J’ai eu la chance d’assister à une réunion en sa compagnie. Et le privilège de « l’accompagner » au cimetière du Père-Lachaise lors de son enterrement en 1982… Il faut conserver son héritage. Alors vous aussi, sortez de vos cachettes et signez la pétition ! » Avec conviction et beaucoup d’humour, l’ancien responsable du club de Fontenay-sous-Bois se laisse alors doucement entraîner vers son passé de professionnel. Avec un brin de nostalgie et beaucoup de revendications…

En écho, à deux pas de là, les joueurs et les curieux peuvent visiter le musée du patrimoine gazier, œuvre d’une association d’anciens ouvriers. Exposition de compteurs datant de 1900, d’outils d’époque… trois salles offrent une plongée dans l’histoire du gaz et du service public, à l’initiative du président de la CMCAS Pascal Chivet, profitant des Journées européennes du patrimoine.

Collection de compteurs à gaz au Musée du patrimoine gazier (Amiens), CMCAS de Picardie. © J.Marando/CCAS

Mais le glas sonne déjà, et les pendules sont prêtes ! Il faut entrer dans les rondes, au nombre de sept. Là, devant les échiquiers, la concentration laisse peu de place à l’échange : les affabilités matinales s‘estompent au profit des coups, parfois magistraux et assassins. Là réside la magie du noble jeu et le paradoxe réjouissant de ses adeptes. Généreusement prodigue en conseils auprès de ses adversaires en dehors des cases, le joueur d’échecs se montre impitoyable sur son terrain. A l’image de Paul, 13 ans, qui, avec un brin d’insolence, va survoler les débats et bousculer la hiérarchie de l’âge.

Les échecs confrontent des joueurs de tous âges © J. Marando/CCAS

Entre deux rondes, Pascal Chivet se satisfait du spectacle, et se projette déjà. « Notre but est de faire connaître les Activités Sociales de l’énergie partout et pour tous, dans un souci de rassemblement intergénérationnel. Ce n’est pas chose aisée, vue la superficie de notre territoire. Mais les cinq nouveaux inscrits et le succès de cette régionale nous encouragent à développer ce jeu au centre de vacances de Ponches et dans la colo de Cayeux-sur-mer. A ce titre, un groupe de travail d’élus CMCAS et CCAS a été constitué pour élaborer le contenu de nos séjours de proximité. Et les échecs en font partie bien sûr. » A voir l’engouement des participants, la touche picarde, celle-là même qui par le biais du chef cuistot du restaurant CCAS proposera un buffet froid exquis le midi aux joueurs, devrait étayer ces projets échiquéens sans écueils.

Les rondes touchent à leur fin et cette année c’est Paul, pensionnaire du club d’échecs de Villepinte, qui remporte brillamment cet open. Mais le roi d’Amiens ne sera pas le prétendant du cap d’Agde, pour les rencontres nationales et internationales… indisponibilité oblige. Son second, en la personne de Michel, ne pourra lui non plus défendre son statut. Alors, c’est Luc Hallay, vainqueur de l’Open du fil rouge au cap d’Agde en 2015, qui profite de ces désistements involontaires. Elu malgré lui, le jeune retraité tentera de conserver et d’honorer son titre sur CapEchecs. De bonne guerre pour la suite.