Capéchecs 2022. Marc’Andria Maurizzi est le plus jeune grand maître international d’échecs français

Originaire de Corse, Marc’Andria Maurizzi était maître international à douze ans, puis grand maître international à quatorze ans. Programmé à CapÉchecs 2022, il est le 14^e joueur français avec un classement Elo de 2 530 points. ©PTextoris-CAPECHECS https://www.capechecs.com

Il décroche des trophées en cascade, mais ne détient pas encore celui de la CCAS ! À 15 ans, Marc’Andria Maurizzi est le plus jeune grand maître international d’échecs français. Il revient cette année au village vacances du Cap d’Agde pour participer à la 20^e édition de CapÉchecs, du 27 octobre au 6 novembre 2022.

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Marc’Andria n’est pas du genre bavard. Ses réponses tiennent souvent en une seule phrase. Il livre parfois quelques développements ou esquisse de légers rires. Sa timidité est faite de politesse et d’humilité. Notre entretien dure vingt-cinq minutes et, tout du long, le jeune homme relativise son parcours hors du commun. « Je prends simplement du plaisir à jouer. »

Marc’Andria, un garçon comme les autres et un adolescent à part. D’un côté, des occupations classiques : les cours, les amis, le foot. De l’autre, des qualificatifs pas ordinaires pour parler de lui : prodige, surdoué, génie. L’an passé, à tout juste 14 ans, il réalise l’exploit de devenir le plus jeune grand maître international (GMI) de l’histoire des échecs français – effaçant le record vieux de vingt-quatre ans d’Étienne Bacrot.

Une « consécration » pour le précoce stratège des 64 cases, qui défie le rythme des pendules depuis de longues années déjà. Régionaux, nationaux, internationaux… Faire la liste de ses succès prendrait trop de temps. Son premier grand titre ? Celui de champion d’Europe a seulement 9 ans (catégorie moins de 10 ans), le deuxième à 12 ans.

Kasparov, champion et partenaire

Marc’Andria collectionne donc les médailles, avec une préférence pour celles faites d’or. Mais, pour bien mesurer l’intérêt que suscite le Français, il faut remonter à 2018 et évoquer un certain Garry Kasparov. Celui qui est considéré comme le meilleur joueur de tous les temps aime entourer la jeune avant-garde. Qui souhaite-il alors coacher ? Sans surprise, Marc’Andria.

Garry Kasparov, ici lors du Ultimate Blitz Challenge en avril 2016. ©www.kasparov.com

L’ancien champion du monde russe des échecs (de 1985 à 2000) l’avait rencontré deux ans plus tôt, le jeune Bastiais et lui s’étant retrouvés coéquipiers lors du tournoi des meilleurs espoirs français. Belle pioche : Marc’Andria impressionne et donne même des conseils à la légende de la discipline, qui découvre alors le « Blitz à quatre ». « Il en était gentiment énervé », plaisante le nouveau GMI.

Le petit champion est donc convié à un stage d’une semaine dans la résidence croate du grand champion. « C’était très impressionnant, se remémore Marc’Andria. Cela m’a pris quelques séances avant que je me détende complètement », reconnaît celui qui est licencié au C’Chartres Échecs. Ensemble, ils creusent les tactiques, les combinaisons, les ouvertures, la psychologie des adversaires.

Bien dans ses baskets, heureux aux échecs

Où et comment éclot le talent du plus précoce grand maître international français ? Sur l’une des terres les plus fertiles à l’égard du « jeu des rois » : la Corse. Sur l’île de Beauté, l’initiation aux échecs est obligatoire à l’école ! Marc’Andria est repéré… en classe de CP. « Ce n’était qu’un enfant. Dans cette situation, on essaie de garder les pieds sur terre », explique Dude Maurizzi, son père.

Le contrôle du papa prime encore. Dude est bienveillant. Il veille à ce que son fils ne se laisse pas submerger par sa trajectoire de prodige. Pas toujours simple : « Il ne faut pas qu’il soit surmené et en même temps on souhaite qu’il vive pleinement sa jeunesse », explique-t-il. Tel « un adolescent comme les autres », toujours.

Marc’Andria Maurizzi face à Anatoli Karpov, Grand maître international depuis 1970. ©PTextoris-CAPECHECS https://www.capechecs.com

Ainsi, et contrairement à ces prédécesseurs GMI, Marc’Andria poursuit une scolarité classique. Et « l’important étant qu’il soit heureux », le jeune homme continue aussi le foot dans les rangs de l’Académie Sporting Club Bastia, club corse phare. Entraînement tous les jours à 16 h 30. « Toutes ces activités consomment beaucoup de temps et il arrivera un jour où il faudra faire des choix, anticipe Dude. Mais Marc’Andria a la tête sur les épaules, on lui fait confiance. »

Donc pour l’instant, foot ou échecs ? « Je peux faire les deux », assure l’adolescent. « Il va peut-être mettre plus de temps à progresser mais il sera plus équilibré, bien dans ses baskets. C’est important qu’il s’ouvre à d’autres choses que les échecs », conclut François Gilles, président du C’Chartres Échecs. À la tête d’un club dépassant les 200 licenciés, ce dernier insiste sur l’importance du « développement » et de « l’accompagnement » des jeunes, afin de ne pas induire « la seule quête de performance ».

Rendez-vous au Cap d’agde

Marc’Andria, qui joue milieu défensif au foot, saura-t-il mener à bien ses attaques sur les pions adverses à CapÉchecs ? Réponse au Cap d’Agde à partir du 28 octobre prochain.

Comme l’an dernier, Marc’Andria fait partie des huit joueurs sélectionnés pour jouer le Trophée dans la désormais célèbre arène de la salle Molière. De cette dernière, il retire l’un des « meilleurs souvenirs » de sa jeune carrière : « On m’a permis d’affronter Antoni Karpov [champion du monde 2005, ndlr] lors du Défi CapÉchecs 2021. Là, pour le coup, j’étais plutôt stressé [rires], mais ç’a été une rencontre sublime. » Et en effet : le suspense a été total jusqu’à l’ultime affrontement, ponctué par la défaite du jeune Corse.

À nouvelle édition, nouveaux défis. Bonne chance, Marc’Andria.