L’avion électrique va-t-il prendre son envol ?

L’avion électrique va-t-il prendre son envol ? | Journal des Activités Sociales de l'énergie | 79383 Airbus E Fan X

Le E-Fan X est le prototype d’avion Airbus à propulsion hybride, que le constructeur entend faire voler en 2020. ©AIRBUS S.A.S 2019

C’était un des sujets phares du dernier Salon du Bourget. Après la voiture, le vélo et la trottinette, l’avion va-t-il passer à la motorisation électrique ? Les enjeux pour l’environnement et le caractère encore incertain de cette technologie forcent la réserve.

Le projet n’a en soi rien d’absurde. En 2015, un petit bimoteur à propulsion électrique, l’E-fan de la société Airbus, a traversé la Manche, comme l’avait fait avant lui Louis Blériot en 1909 dans un des grands moments épiques de l’histoire de l’aviation. Aucun doute, donc, qu’un aéronef à propulsion électrique puisse voler sur une courte distance. Tout l’enjeu technique est d’augmenter son autonomie ou sa charge utile. Donc de rendre les batteries qu’il emporte plus légères ou plus efficaces.

Sur fond de critiques croissantes du transport aérien pour sa responsabilité dans les émissions de gaz à effet de serre, plusieurs entreprises ont multiplié les annonces frappantes ces derniers mois. Au Salon du Bourget, la start-up israélienne Eviation a présenté son avion électrique Alice, capable de convoyer une dizaine de personnes, dont la commercialisation est annoncée pour 2022.

D’ici à 2030, « les vols en avions électriques pourraient représenter près de 20 % de nos capacités » a annoncé le directeur général en charge de l’ingénierie de la compagnie à bas coût EasyJet, qui évoque en particulier l’intérêt de la propulsion électrique pour des lignes courtes, comme Londres-Paris ou Toulouse-Nice.

Les grands constructeurs aéronautiques ne sont pas en reste. Airbus annonce le vol d’essai d’ici à deux ans de son E-fan X, un quadriréacteur dont un des propulseurs aura été remplacé par un moteur d’une puissance de 2 MW, puissance jusque-là jamais atteinte dans la motorisation électrique. Ces appareils voleraient moins haut, moins vite, et sur de plus courtes distances, mais avec l’avantage majeur d’émettre beaucoup moins de gaz à effet de serre et d’être nettement plus silencieux.

L’hybridation privilégiée

Il faut cependant relativiser ces annonces. La compagnie EasyJet table certes sur des avions électriques emportant 150 passagers à l’horizon 2030. Mais son partenaire industriel, la firme Wright Electric, n’est pour le moment en mesure d’envisager qu’un avion de neuf passagers.

Les problèmes techniques restent considérables. La plupart des ingénieurs aéronautiques estiment plus vraisemblable que l’aviation suive une trajectoire comparable à celle de l’automobile dans son passage à une motorisation plus propre : à savoir de commencer par l’hybride.

« L’hybridation va obliger à repenser l’avion commercial tel qu’on le connaît depuis la Seconde Guerre mondiale. En modifiant les sources d’énergie présentes à bord et la motorisation, c’est toute l’aérodynamique et donc l’architecture des appareils qui seront modifiées. »
Jérôme Bouchard, pilote et expert de la firme de conseil en stratégie Oliver Wyman

L’architecture de ces appareils hybrides, dont les plans se multiplient, reposerait dans un premier temps, d’une part, sur des turboréacteurs activés durant les phases de vol consommant plus de puissance comme le décollage, et, d’autre part, sur une motorisation électrique accessoire, nourrie par des batteries nichées dans les ailes et alimentées par la combustion du kérosène, qui viendrait en appoint.

L’Ampaire 337, premier hybride à voler, peut transporter jusqu’à six personnes.

L’idée est d’utiliser l’excellent rendement du moteur électrique pour améliorer la performance énergétique globale de l’appareil. « Si un moteur hybride électrique convertit 40 % de l’énergie fossile (par opposition aux 30 % des moteurs classiques), cela permettrait de remplacer le quart de cette dernière par de l’énergie stockée sous forme de batteries », observent Jean Thomassin et Greg Winn (cités dans la revue spécialisée « Air et Cosmos », juin 2019), qui dirigent le projet d’avion hybride de la firme United Technologies Corporation.

Le premier appareil recourant à cette technologie devrait voler en 2022. À terme, il devrait surtout s’adresser au marché de l’aviation d’affaires ou aux liaisons court-courriers.

Élitiste ou démocratique ?

Aussi passionnantes soient-elles pour les ingénieurs, ces recherches renvoient donc à un choix politique qui devra être tranché : puisque le transport aérien électrique à longue ou même moyenne distance reste encore aujourd’hui hors d’atteinte, faut-il vraiment développer l’aviation hybride à courte distance plutôt que le train ? En d’autres termes, faut-il préférer une technologie encore incertaine et qui risque de rester réservée à une élite, à une technologie qui a fait ses preuves et s’adresse à tous ?

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